La nouvelle série d’interview de la FNA !
Plongez dans l’univers de l’après-vente automobile avec des interviews exclusives de nos adhérents. Explorez leurs défis quotidiens, leurs réflexions sur l’innovation et leur contribution essentielle à l’évolution de leur métier.
« La formation est vraiment la mission prioritaire de la FNA !»
En 6e déjà, Robert Bassols organisait des grèves pour faire entendre la voix de ceux qui en avait besoin. Aujourd’hui, il rempile pour un deuxième mandat de Président de la FNA. Plus qu’une fonction, il voit son rôle comme une véritable mission : celle d’aider les artisans réparateurs automobile à prendre le virage des nouvelles énergies. Son trio gagnant : formation, proximité et accompagnement. Interview.
Quelle définition faites-vous du métier d’artisan réparateur automobile ?
Je dirais que dans le flou artistique qui règne aujourd’hui et dans lequel se perdent les automobilistes, le réparateur doit avoir les pieds sur terre et faire ce qu’il sait très bien faire : guider ses clients vers un achat raisonné. Nos clients ne savent plus quel véhicule ils doivent acheter : électrique ou pas, hybride ou pas, thermique ou pas… Le réparateur doit donc les accompagner dans l’achat d’un véhicule utile pour qu’ils ne cèdent pas seulement aux sirènes des lobbyings.
Je pense que c’est quelque chose que les réparateurs ont en eux et doivent véritablement s’approprier. Les artisans réparateurs automobile sont en effet souvent situés dans des milieux ruraux et ils sont le lien de proximité qui subsiste. On n’y parle pas uniquement moteur et plaque d’immatriculation. On y échange sur ses problèmes, sa vie, etc. Cette proximité-là est un avantage réel…à nous d’en tirer le meilleur parti.
Je pense également que l’arrivée des nouvelles énergies est une aubaine car elles vont, de fait, remplir davantage les ateliers. Il ne faut pas laisser passer cette chance et se la faire piquer par des soi-disant spécialistes, comme c’est arrivée par le passé, pour les échappements ou les entretiens. L‘avenir nous appartient. À nous de choisir si nous sommes capables de prendre ce virage-là. Et l’avenir c’est aujourd’hui, ce n’est pas demain !
Comment les aidez-vous à aborder ce virage du multi-énergies ?
Par la formation ! J’estime qu’elle est essentielle, qu’elle est même vitale ! Personne ne peut aborder seul cette question des changements de mobilité. Et le meilleur moyen d’y parvenir, c’est de se rapprocher des centres de formation. Pour cela, notre fédération, qui représente les artisans et dispose d’une soixantaine d’antennes, s’appuie sur le CFPA. Nous sommes donc en mesure de proposer des formations partout en France, au plus près de nos ressortissants. Par exemple, nous essayons de créer au moins un centre dans chaque département afin que les artisans, qui sont souvent seuls avec 2 ou 3 salariés, n’aient pas besoin de s’absenter trop longtemps de leur activité pour venir se former. L’idée est vraiment de leur permettre à tout prix de se former car c’est la seule façon de réussir dans cette voie qui est en train de s’ouvrir sur les nouvelles énergies et ne laisser personne sur le bord de la route.
Vous parliez de formations « au plus près » des artisans. Comment faites-vous ?
Au-delà du CFPA qui se déplace partout dans l’Hexagone, nous nous appuyons également sur les Centres de Formation des Apprentis (CFA) de la Chambre des Métiers qui, eux, sont présents dans tous les départements. Cela nous permet donc d’avoir un maillage très large, mais aussi une vraie capacité à proposer des formations très vastes allant de celles que l’on considère « essentielles » comme la climatisation ou la mise hors tension des véhicules, à des formations plus techniques autour des IA par exemple. Et pour entrer dans des considérations plus terre-à-terre, il faut savoir que la FNA dispose d’une enveloppe de plus de 5 millions d’euros par an pour faire ses formations. À titre de comparaison, l’enveloppe allouée aux Chambres des Métiers pour toute la France est de 1,5 million par an ! D’ailleurs se sont souvent nos formateurs qui vont chez eux dispenser les formations…
Pourtant, il y a encore une vraie défiance des artisans réparateurs à l’égard de ces multi-énergies. Comment les convaincre ?
Je dis toujours à nos ressortissants, quand je vais dans des assemblées locales, que nous avons une chance extraordinaire de vivre ces moments-là. À 67 ans, j’ai encore mon atelier dans mon petit village et je suis ravi de pouvoir vivre ce combat, qui est un combat extraordinaire. Pourquoi ? Parce qu’on nous apprend à toujours aller de l’avant, mais en réalité, cela fait 130 ans que l’on travaille sur des moteurs thermiques. Là, enfin, on nous propose de nouvelles énergies, de nouvelles façons de nous déplacer, d’autre mobilités. Cela nous permet d’ajouter plusieurs cordes à notre arc et peut-être de professionnaliser davantage notre métier, de le rendre plus technique, de sortir de l’image d’Épinal du réparateur qui a les mains dans la graisse. Aujourd’hui, d’ailleurs, le métier se féminise et de jeunes ingénieurs s’orientent vers nos professions…
L’ancienne génération est-elle aussi optimiste ?
Franchement, à mon avis, en 2040-2050 il n’y aura pas plus de 25 % du parc qui sera électrifié. Tout le reste ce sera encore du thermique, de l’hydrogène etc. Alors qu’il s’agisse de la nouvelle ou de l’ancienne génération, tout le monde y trouvera son compte ! C’est d’ailleurs ce que je dis aux pouvoirs publics lorsqu’ils me demandent (rarement) mon avis ! Parce que franchement, soyons réalistes : Si tout le parc roulant était électrique on ne serait capable ni de produire l’énergie nécessaire, ni de produire le nombre de batteries nécessaire. Plusieurs énergies vont donc coexister sur le marché. En revanche, ce n’est pas une raison pour rester à ne rien faire. Il faudra quand même que cette « ancienne génération » se tienne au fait des nouveautés, qu’elle se forme, qu’elle s’équipe, et qu’elle attire ainsi de jeunes recrues. D’où, une fois encore, la nécessité de se former. Et puis les garanties constructeur sur les véhicules électriques vont passer à 8 ou 10 ans, ce qui veut dire que si les réparateurs ne sont pas un peu habiles, ils vont perdre une partie des réparations.
Est-il nécessaire également pour un artisan réparateur, de savoir diversifier ses activités ?
Oui, forcément et c’est d’autant plus vrai lorsque l’on est installé en ruralité. Encore une fois, je parlais tout à l’heure de la nécessité pour les réparateurs d’être également des conseillers pour leurs clients. C’est une première étape vers la diversification, mais ce n’est pas la seule. Car aujourd’hui, un garage en ruralité endosse presque le rôle de magasin de proximité. Et il faut se servir de cet atout pour s’ouvrir à plein d’opportunités, trouver d’autres ressources : disposer de bornes de recharge électrique, voire de recharges hydrogène, faire de la location, des stations de lavage, du pare-brise, etc. Et pour tout cela, il n’y a pas de secret : il faut se former !
Comment utilisez-vous votre propre expérience de garagiste dans votre rôle de Président de la FNA ?
Et bien typiquement, je suis bien placé pour parler de diversification car cela fait déjà un moment que j’ai des bornes électriques ou que je fais du lavage de voiture et de la vente de véhicules d’occasion. Au début, cette diversification représentait à peine 4 à 5 % de mon chiffre d’affaires. Aujourd’hui, c’est 20 %.
Après, Président de la FNA ou pas, le tout est de savoir si tous nos réparateurs ont envie de ça ? La réponse est non ! Certains ont décidé de s’y mettre, d’autres pas et préfèrent capitaliser sur l’existant. Libre à eux. Je pense simplement que si un jour ils veulent vendre leur affaire, il faudra qu’elle ait autre chose à offrir que de la simple mécanique ! Pour moi, la formation, est vraiment la mission prioritaire de la FNA, d’ailleurs j’en fais l’une de mes principales batailles pour ma nouvelle mandature. Mon objectif, c’est que le CFPA soit l’avenir de nos ressortissants mais aussi celui de la fédération. La proximité, la réactivité et la formation ce sont, pour mois, les 3 priorités que la FNA doit porter.
Vous ne dites pas « adhérent », mais « ressortissant »… un mot que l’on emploi plus souvent en géopolitique que pour parler d’une fédération. Pourquoi ce mot ?
Franchement, je pense qu’il n’y a que moi pour employer ce terme-là (rires) ! Je n’aime pas dire « adhérent » parce que l’on peut être adhérent dans une salle de sport, dans un club de lecture. Bref, c’est un mot que je trouve trop générique. Au contraire, ceux qui nous rejoignent sont des gens qui sont en demande de quelque chose qu’ils ne peuvent pas trouver ailleurs. C’est une peu comme s’ils étaient devenus des amis ou des membres de la même famille, en exagérant un peu. Or, un ressortissant, il a besoin d’un appui, d’un soutien, d’une main tendue.
Cela en dit long sur votre propre engagement et sur celui de la FNA auprès des artisans…
Cela correspond surtout à ma vision de l’entraide, à ma façon de voir les gens qui ont besoin de nous. Ils ne sont pas juste là pour adhérer, payer une cotisation et fin de l’histoire ! Alors évidemment, le mot peut paraitre un peu fort, mais le métier d’artisan réparateur est un combat, il a besoin que ses acteurs existent, qu’ils soient pris au sérieux, qu’ils soient accompagnés. Il n’est pas question que nos ressortissants, donc, soient envoyés de service en service pendant des lustres lorsqu’ils nous appellent. Il faut au contraire que nous soyons hyper réactifs. C’est pour cette raison que nous étoffons peu à peu notre équipe : parce que je veux que nous soyons capables de répondre rapidement aux demandes, de dépatouiller les problèmes et interrogations de nos ressortissants. Notre but c’est d’être au service de nos artisans et c’est vraiment ça qui m’anime !
Auriez-vous un mot de la fin à partager ?
Oui : ne restez surtout pas seuls dans votre coin devant l’explosion des nouveautés. Et surtout, faites ce que vous savez bien faire, ne cherchez pas à faire ce que vous ne savez pas. Le monde change, le client évolue et il faut évoluer avec. C’est évidemment un travail de longue haleine, et échanger, cela permet de se persuader aussi que c’est possible et que ça n’est ni compliqué, ni onéreux.