Vous allez avoir ou avez eu une visite des agents de contrôle de l’inspection du travail. Afin d’être bien préparé à cette visite, il faut connaître le rôle et les attributions de chacun, et surtout être à jour de vos obligations en tant qu’employeur.
Rôle et missions de l’inspection du travail
- Assurer l’application des dispositions légales et conventionnelles, relatives aux conditions de travail et à la protection des travailleurs dans l’exercice de leur profession ;
- Fournir des informations et des conseils techniques aux employeurs et aux travailleurs sur les moyens les plus efficaces d’observer les dispositions légales ;
- Porter à l’attention de l’autorité compétente les déficiences ou les abus qui ne sont pas spécifiquement couverts par les dispositions légales existantes. Conv. OIT n° 81, art. 3
Pour rappel, la Loi Travail a renforcé les pouvoirs de l’inspection du travail depuis le 1er juillet 2016.
L’inspecteur du travail dispose d’une compétence générale en matière d’application de la législation du travail, des dispositions légales relatives au régime de travail, ainsi qu’à celles des conventions et accords collectifs de travail.
Ses compétences sont larges, elles relèvent de ces différents domaines :
- Infractions commises en matière de discriminations : refus d’embauche, sanction ou licenciement …;
- Délits de harcèlement sexuel ou moral prévus, dans le cadre des relations de travail ;
- Infractions relatives aux conditions de travail et d’hébergement contraires à la dignité humaine ;
- Infractions aux dispositions de prévention étendues des Caisses régionales d’assurance-maladie ;
- Infractions relatives aux déclarations des accidents du travail ;
- Infractions aux dispositions relatives à l’interdiction de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif ;
- Infractions relatives aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France ;
- Infractions au code de la consommation : dispositions relatives à la certification des services et produits autres qu’alimentaires, à la conformité et la sécurité des produits et des services ;
- Infractions aux dispositions relatives à la domiciliation des personnes inscrites au Registre du commerce et des sociétés ;
- Défense des droits fondamentaux et des libertés individuelles des salariés ;
- Contrôle des règles propres au contrat de travail ;
- Respect des relations collectives de travail dans l’entreprise ;
- Prévention des risques professionnels et amélioration des conditions de travail.
Sachez que les agents de contrôle de l’inspection du travail disposent d’une garantie d’indépendance dans l’exercice de leurs missions, qu’il est laissé à leur libre décision de donner des avertissements ou des conseils au lieu d’intenter ou de recommander des poursuites et enfin qu’ils bénéficient d’une protection dans l’exercice de leurs fonctions.
Ils ont en outre, une obligation de discrétion et sont tenus au secret professionnel, mais ils peuvent échanger des informations avec d’autres services de contrôle.
Le contrôle en entreprise
Pour mener à bien leur mission, les inspecteurs ou contrôleurs du travail sont amenés à se déplacer dans l’entreprise, par conséquent, si un agent de contrôle se présente, faites le maximum pour que tout se passe bien.
1) L’accès à l’entreprise
- L’inspecteur du travail à une liberté d’accès à tout établissement soumis à son contrôle, il peut y pénétrer librement, sans avertissement préalable et à toute heure du jour et de la nuit ;
- Cette liberté d’accès s’étend à tous les locaux de l’entreprise, y compris les locaux de travail, les vestiaires, sanitaires, cantine… afin de vérifier les conditions d’hygiène et de sécurité ;
- La seule restriction étant le domicile privé.
L’employeur ou toute personne s’opposant à l’exercice des fonctions de l’inspecteur risque : 1 an d’emprisonnement et 37 500 euros d’amende, idem si vous fournissez de fausses informations ou des informations inexactes.
En cas de propos grossier ou malveillant à l’encontre de l’inspecteur, l’employeur encourt une peine de 6 mois d’emprisonnement et une amende de 7 500 euros, idem si menaces de mort.
2) La présentation de l’agent
L’agent de l’inspection du travail doit informer de sa présence l’employeur ou son représentant, à moins qu’il n’estime qu’un tel avis risque de porter préjudice à l’efficacité du contrôle. Il doit être muni de pièces justificatives. Exiger la carte professionnelle d’un agent alors que l’on n’a pas de doute sur son identité, est un délit d’outrage…En général l’inspecteur présente de lui-même sa carte professionnelle.
3) Le déplacement dans l’entreprise
L’inspecteur peut demander à être accompagné du chef d’entreprise ou de son représentant pour effectuer la visite des locaux. Vous n’êtes pas obligé d’accepter, mais cela est plus raisonnable. Il peut également demander à être accompagné par un membre du CSE.
4) L’enquête
L’inspecteur peut auditionner l’employeur ou les salariés qui se trouvent dans les locaux de l’entreprise, soit seuls ou en présence de témoins, et contrôler leur l’identité et leur adresse.
5) L’assistance par un membre du CSE
L’agent doit demander au membre du CSE de l’accompagner s’il s’est rendu dans l’entreprise à sa demande, dans le cas contraire, il peut proposer au membre du CSE de l’accompagner.
6) Quels documents peuvent être demandés ?
L’agent peut se faire présenter l’ensemble des livres, registres et documents rendus obligatoires par la réglementation du travail. Il peut en faire des copies.
Les principaux documents (varient selon taille et existence de représentants du personnel) demandés ou devant être tenus à disposition sont :
- Déclaration préalable d’embauche ;
- Déclaration d’emploi de salariés par l’établissement (si période de 6 mois sans salarié, ou changement d’exploitant, ou transfert ou modification des conditions d’exploitation) : à envoyer ;
- Registre unique du personnel ;
- Autorisations de travail des salariés étrangers ;
- Les contrats de travail (CDD, CDI, travail temporaire, temps partiel, apprentissage et professionnalisation) ;
- Règlement intérieur et notes de service ;
- Conventions et accords collectifs ;
- PV élections / carence ;
- Documents permettant le décompte des durées individuelles de travail ;
- Documents relatifs aux astreintes ;
- Repos hebdomadaire donné un autre jour que le dimanche ;
- Bulletins de paie ;
- Information CP ;
- Fiche d’entreprise ;
- Fiche d’aptitude médicale …
La non présentation de documents et registres obligatoires peut faire l’objet d’une amende prévue pour les contraventions de 3ème classe.
7) Demande de contrôles à la charge de l’employeur
Ils peuvent demander à l’employeur de faire procéder à des contrôles techniques qui sont à la charge de l ’employeur.
- Faire vérifier l’état de conformité de ses installations et équipements avec les dispositions applicables ;
- Faire procéder à la mesure de l’exposition des travailleurs à des nuisances physiques, à des agents physiques, chimiques ou biologiques donnant lieu à des limites d’exposition ;
- Faire procéder à l’analyse de matières, y compris les substances, mélanges, matériaux, équipements, matériels ou articles susceptibles de comporter ou d’émettre des agents physiques, chimiques ou biologiques dangereux pour les travailleurs.
Il peut également demander :
- Des contrôles et des mesures permettant de vérifier la conformité de l’aération et de l’assainissement des locaux de travail ;
- La vérification de la conformité des équipements de travail ;
- Du mesurage de l’exposition au bruit, aux vibrations mécaniques ;
- De la vérification des installations électriques.
Les interlocuteurs de l’inspecteur du travail
Il peut être amené à avoir des relations avec : le chef d’entreprise, les représentants du CSE (s’il existe) et avec les autres intervenants dans l’entreprise tels que les agents de la Carsat ou les médecins du travail ou les médecins-inspecteurs du travail.
Les moyens d’action des agents de l’inspection du travail
Si une infraction est constatée suite à un contrôle, l’inspection du travail dispose d’un pouvoir d’appréciation et peut utiliser différents moyens.
- L’observation
C’est le moyen le plus utilisé, qui consiste en un rappel des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, sans que des suites pénales soient immédiatement données. L’observation peut être verbale ou écrite, elle fait suite à une visite de l’entreprise.
- Les mises en demeure : décision administrative obligeant l’employeur à régulariser une infraction rapidement
En matière d’apprentissage : l’inspecteur du travail ou l’inspecteur de l’apprentissage peut mettre l’employeur en demeure de respecter les obligations légales et de prendre les mesures ou d’assurer les garanties de nature à permettre une formation satisfaisante. C. trav., art. R. 6225-1 à R. 6225-3.
Il peut initier une procédure d’urgence en cas de risque sérieux d’atteinte à la santé ou là l’intégrité physique ou morale de l’apprenti.
En matière d’hygiène et de sécurité : la mise en demeure est préalable au procès verbal sauf en cas de danger grave ou imminent pour l’intégrité physique des salariés.
La mise en demeure doit être préalable à l’arrêt temporaire de l’activité en raison d’un dépassement persistant de la valeur limite de concentration d’une substance chimique cancérogène, mutagène ou toxique pour la reproduction.
La mise en demeure de réduction d’intervalle entre les vérifications périodiques des équipements de travail ou de protection individuelle.
- Les procès verbaux
Il s’git d’une décision importante qui permet de provoquer la mise en œuvre de sanctions pénales et a pour seul objet l’application de la loi. Il ne peut être dressé procès-verbal que lorsqu’un texte a expressément prévu une sanction pénale.
Le PV doit contenir les éléments suivants : identification de l’auteur de l’infraction, localisation de l’infraction, descriptif des faits, prescriptions légales, identité du rédacteur, date du PV.
Ils sont établis en double exemplaire, l’un est envoyé au préfet et l’autre est déposé au parquet. L’inspecteur informe la personne visée des faits susceptible de constituer une infraction pénale et les sanctions encourues, avant l’envoi au procureur de la République.
- La procédure de référé
L’inspecteur peut seul saisir en référé le président du tribunal de grande instance pour voir ordonner toutes mesures propres à faire cesser, dans les établissements de vente de détail et de prestations de services, l’emploi illicite de salariés : interdiction du travail le dimanche. Le contrôleur du travail ne peut mettre en œuvre cette procédure.
En matière d’hygiène et de sécurité : en cas de risque sérieux d’atteinte à l’intégrité physique d’un travailleur résultant de l’inobservation de la réglementation en matière d’hygiène et de sécurité, il peut saisir le juge des référés pour faire cesser le risque (immobilisation des machines, saisie de matériel …).
- Le retrait d’affectation des jeunes salariés en situation de danger
Depuis 2016, l’inspecteur peut ordonner le retrait immédiat du jeune de moins de 18 ans s’il est affecté à des travaux interdits ou réglementés l’exposant à un danger grave et imminent.
- Les amendes
Le directeur de la Direccte peut prononcer une amende administrative pour sanctionner les manquements/infractions en matière de santé et sécurité du travail, de durée du travail, et des salaires soit :
- Violation de l’interdiction d’employer un jeune moins de 18 ans à des travaux interdits ou réglementés ;
- Non-respect des durées maximales de travail quotidiennes et hebdomadaires ;
- Non-respect du repos minimum quotidien et hebdomadaire ;
- Absence de décompte de la durée de travail ;
- Non-respect du Smic et des minima conventionnels ;
- Manquements concernant les installations sanitaires, la restauration et l’hébergement ainsi que, dans le secteur des travaux de bâtiment et génie civil, les manquements aux mesures de protection concernant l’hygiène et l’hébergement. Montant de l’amende = 4 000 euros * autant de fois qu’il y a de travailleurs concernés par le manquement. Montant doublé = 8 000 euros si nouveau manquement.
Amendes administratives en cas d’inexécution des décisions de l’agent de contrôle de l’inspection du travail, de 10 000 euros par salarié concerné, si non respect : de l’arrêt temporaire de travaux ou l’activité, demandes de vérification de mesures ou d’analyses, le retrait d’un jeune affecté à des travaux dangereux ou réglementés.
Quelques conseils afin qu’une visite de l’inspecteur ou du contrôleur du travail se passe dans les meilleures conditions.
Ne vous opposez pas à un contrôle de l’inspection du travail, sous peine de commettre un délit d’obstacle (37 500 euros d’amende et un an d’emprisonnement), et recevez le cordialement, avec son accord demandez à la personne qui s’occupe de la gestion RH d’être présente.
Préparez vous à :
• Accueillir l’inspecteur avec courtoisie et accompagnez le tout au long de sa visite ;
• Prévenir l’encadrement et les membres du CSE de sa présence ;
• Lui réserver, s’il souhaite procéder à des auditions, un bureau à sa disposition ;
• Noter ses observations, les questions posées, les personnes rencontrées, ce qu’elles ont déclaré et les locaux visités ;
• Le questionner sur les suites de son contrôle, et modifier ce qui ne va pas rapidement au sein de votre entreprise.
Sachez qu’il faut toujours avoir à porté de mains certains documents que l’inspecteur est à même de demander, comme des contrats de travail, le registre du personnel, l’affichage obligatoire, les registres de sécurité et autres documents, qui souvent sont détenus par votre cabinet comptable.
Le contrôle des diplômes pour les activités artisanales réglementées
Outre l’inspection du travail compétente, les agents de la DGCCRF peuvent également contrôler votre entreprise. Il ressort de ces contrôles que désormais systématiquement, il est demandé aux chefs d’entreprise de présenter les diplômes de leurs salariés.
Soyez à jour de cette obligation, faites le point avec vos salariés, demandez leur de présenter leur diplôme, quel que soit leur poste, afin d’en faire une copie.
Les agents de la répression des fraudes sont également habilités à demander la communication des diplômes pour les activités réglementées : entretien et réparation mécanique, carrossier, contrôleur technique …
Pour rappel : le code de l’artisanat prévoit les qualifications à respecter dans certaines professions artisanales.
Principe : l’activité d’entretien et réparation des véhicules terrestres à moteur et des machines agricoles, forestières et de travaux publics ne peut être exercée que par une personne qualifiée professionnellement ou sous le contrôle effectif et permanent de celle-ci (article L. 121-1-1° du code de l’artisanat)
Cette personne, soit lorsqu’elle exerce elle-même tout ou partie de cette activité d’entretien et réparation, soit lorsqu’elle contrôle l’exercice par des personnes non qualifiées, doit être titulaire :
– d’un certificat d’aptitude professionnelle ;
– ou d’un brevet d’études professionnelles ;
– ou d’un diplôme ou titre de niveau égal ou supérieur homologué ou enregistré lors de sa délivrance au répertoire national des certifications professionnelles institué par l’article L. 6113-1 du code du travail.
Ces diplômes ou titres doivent attester d’une qualification dans le métier ou dans la partie d’activité en cause (Article R. 121-1 du code de l’artisanat)
A défaut de diplômes ou de titres cette personne doit justifier d’une expérience professionnelle de trois années effectives sur le territoire de la République, de l’Union européenne ou d’un autre Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen, acquise en qualité de dirigeant d’entreprise, de travailleur indépendant ou de salarié dans l’exercice du métier ou de la partie d’activité en cause.