La FNA alerte Matignon sur l’avenir de la filière des services de l’automobile

26 février 2025Communiqué de presse

La FNA alerte Matignon sur l’avenir de la filière des services de l’automobile

La Fédération Nationale de l’Automobile (FNA), organisation professionnelle représentative des Entrepreneurs-Artisans de l’automobile et de la mobilité depuis plus de 100 ans, s’est rendue ce lundi à Matignon pour exprimer son inquiétude sur l’avenir de la filière des services de l’automobile et demander au gouvernement de prendre des mesures à ce sujet. L’occasion pour la fédération de présenter la feuille de route qu’elle défend à Bruxelles dans le cadre du dialogue stratégique pour la filière automobile.

Paul Bazin, Chef de Pôle Travail, emploi, insertion et retraites, ainsi que Paul Teboul, Chef de Pôle Économie, finances, industrie et numérique, ont ainsi reçu Robert Bassols, Président de la FNA, et Émilie Repusseau, Secrétaire Générale Adjointe, pour échanger sur les défis majeurs qui menacent l’avenir de la filière, notamment face aux mutations technologiques, aux évolutions réglementaires et à la fiscalité de plus en plus contraignante.

Pour Robert Bassols, Président de la FNA : ❝ L’avenir des entrepreneurs de l’automobile est aujourd’hui à un tournant critique : l’accès aux données des véhicules, la réparabilité des nouveaux modèles et la fiscalité sont des enjeux vitaux pour notre secteur. En tant qu’organisation représentative des professionnels de l’automobile, nous nous devions d’alerter le gouvernement sur l’urgence d’agir pour que nos entreprises puissent continuer à offrir aux automobilistes un service de proximité, compétitif et durable. Nous les avons également alertés sur le retrait des compagnies d’assurance dans l’assurabilité des entreprises des services de l’automobile, dont certaines assurent un service quasi public à l’image de l’évaluation des véhicules en panne et accidentés❞

Une branche essentielle face à des enjeux existentiels

Le secteur des services de l’automobile joue un rôle essentiel dans la mobilité des Français. Une majorité d’entreprises de petite taille (95 % ont moins de 11 salariés) assurent l’entretien du parc roulant vieillissant (13 ans en moyenne en 2024, contre 11,5 ans en 2023).

Les réparateurs indépendants jouent en effet un rôle prépondérant dans l’entretien et la réparation des véhicules, puisque dès la 5ème année après leur mise en circulation, seulement 33% des véhicules sont adressés à des réparateurs agréées par les constructeurs (RA1 et RA2), un chiffre qui tombe à 16% entre 7 et 9 ans. La montée des motorisations électriques (17 % des nouvelles immatriculations en janvier 2025) soulève de nouveaux défis pour les professionnels de l’après-vente.

Des mesures indispensables à mettre en place

Face à ces enjeux, la FNA a formulé lors de cette rencontre à Matignon nos demandes prioritaires pour garantir la pérénité et la compétitivité de la filière :

Les 7 demandes clés de la FNA pour garantir la pérennité de la filière des services de l’automobile :

  1. Permettre aux réparateurs indépendants l’accès au client consommateur
  2. Assurer un accès équitable aux données des véhicules
  3. Légiférer pour maintenir la réparabilité des véhicules
  4. Stabiliser et clarifier la fiscalité automobile
  5. Soutenir la formation et l’attractivité des métiers
  6. Garantir aux professionnels de l’automobile d’être couverts par une assurance
  7. Préserver ces entreprises de proximité, acteurs clés de la transition écologique et des mobilités
  • Permettre aux réparateurs indépendants l’accès au client consommateur

La haute technologie des nouveaux véhicules ouvre davantage de perspectives de services directs fournis à distance par le constructeur aux automobilistes, auxquels les opérateurs indépendants n’ont pas accès :

  • Surveillance et diagnostic à distance : l’état du véhicule est contrôlé en temps réel et les problèmes détectés avant qu’ils ne deviennent graves. Des alertes sont alors envoyées au conducteur et au centre de maintenance le plus proche, agréé par le constructeur.
  • Mises à jour à distance « over the air » (OTA).
  • Abonnements et mises à jour payants pour l’usager.

Sous prétexte de sécurité informatique, les constructeurs appliquent une technologie protectrice de leurs intérêts qui modifie le paysage de l’aval de la filière et fausse l’équilibre actuel entre les opérateurs indépendants et ceux du réseau du constructeur. Ils mettent ainsi en péril l’avenir des réparateurs indépendants.

  • Assurer un accès équitable aux données des véhicules

La FNA est montée au créneau concernant la rétention par les constructeurs des données indispensables du véhicule, essentielles à l’accomplissement des prestations demandées par les clients automobilistes. Nous avons demandé au Gouvernement de soutenir :

  • L’adoption du DATA ACT Auto afin de rendre accessible l’accès aux données générées par le véhicule ou données d’usage
  • L’interdiction du verrouillage de certaines données des véhicules qui devraient être normalement accessibles selon la réglementation européenne, et mieux faire respecter le périmètre des données relevant d’une passerelle de sécurité (« Gateway »).
  • La révision du règlement européen de 2018 sur l’homologation des véhicules et notamment en précisant les opérations qui nécessitent une authentification, car c’est actuellement le constructeur qui définit le curseur. Quant au SERMI, qui doit permettre aux professionnels indépendants certifiés d’accéder aux informations nécessaires pour réaliser des réparations et des diagnostics liés à la sécurité, celui-ci n’est également pas suffisamment cadré.
  • Légiférer pour maintenir la réparabilité des véhicules

Outre l’aspect environnemental avec le risque d’un grand nombre de véhicules envoyés à la casse alors qu’ils pourraient encore rouler, les problèmes liés à la réparabilité des véhicules récents, et notamment des véhicules électriques, représentent une vraie menace existentielle pour les réparateurs indépendants mais également, in fine, les automobilistes qui n’auront pas les moyens financiers de les réparer ou ne pourront simplement pas le faire. La FNA demande au Législateur européen de prendre des mesures pour :

  • Les batteries :
  • Une durée de disponibilité des batteries et de leurs composants doit être rendue obligatoire, pour permettre leur entretien et leur réparation.
  • Les batteries scellées ou incluant de la mousse empêchant leur réparabilité, alors qu’elles représentent jusqu’à 40 % de la valeur du véhicule, doivent être interdites.
  • Un cadre réglementaire de réparabilité de la batterie doit être défini.
  • Les pièces détachées / composants des pièces détachées :
  • La disponibilité des pièces détachées doit être obligatoire pour les véhicules (19 ans) comme pour les smartphones (10 ans), certaines pièces détachées étant aujourd’hui difficiles voire impossibles à trouver sur certaines marques.
  • La sérialisation des pièces doit être encadrée, voire interdite, afin d’assurer la réparabilité des véhicules et l’utilisation des PIEC.

Le « giga casting », qui consiste à mouler d’un seul bloc de nombreuses pièces et rend tout désassemblage impossible, implique qu’au moindre choc, il faudrait remplacer une partie si importante de la voiture qu’il serait probablement plus rentable de la mettre à la casse.

‣ Exemple : pour son « Model Y », Tesla a remplacé la partie arrière du « Model 3 », initialement constituée de 70 pièces, par 2 pièces de métal seulement.

  • Les composants doivent être considérés comme des éléments d’une pièce détachée.
  • Les solutions logicielles et leur mises à jour des véhicules connectés doivent être fournies et rendues disponibles plusieurs années après
  • Garantir aux professionnels de l’automobile d’être couverts par une assurance

De plus en plus d’entreprises du secteur se retrouvent sans assurance professionnelle, suite au désengagement de certaines compagnies d’assurance du marché ou à des hausses de primes trop excessives, rendant leur activité économiquement insoutenable. Ce phénomène touche toute la filière, des réparateurs indépendants, aux dépanneurs-remorqueurs en passant par les gardiens de fourrière ou encore les auto-écoles.

Face à cette situation alarmante, la FNA appelle les pouvoirs publics à prendre des mesures pour garantir un accès équitable aux assurances professionnelles. Sans action rapide, ce phénomène risque de fragiliser l’ensemble du secteur et de compromettre la continuité des services de proximité aux automobilistes.

  • Stabiliser et clarifier la fiscalité automobile

La fiscalité automobile est pour le moins changeante et relativement incohérente, et l’usager en paye les pots cassés. La Loi de Finances 2025 n’a pas dérogé à la règle avec, pour la FNA, plusieurs écueils (sans rentrer dans l’analyse juridique et fiscale) :

  1. L’élargissement des véhicules impactés par un déplacement des curseurs, comme un durcissement du malus au poids (passant de 1,6 tonne à 1,5 tonne en 2026) ou du malus CO2.
  2. L’imposition des véhicules électriques sur la base du malus au poids avec un abattement de 600kg à compter du 1er juillet 2026.

L’exonération des véhicules électriques ne concernera que ceux à faible empreinte carbone au sens de l’article L. 224 6-5 du code de l’environnement dont les critères sont flous et tout à fait modulables dans le temps.

  • Le sort des véhicules hybrides rechargeables, depuis la suppression pour ces véhicules de la dispense du malus au poids
  • Le nouveau module de calcul qui complexifie la réfaction applicable au malus CO2 et au malus au poids par année d’ancienneté du véhicule, pour la 1ere immatriculation en France d’un véhicule importé et/ou transformé, par l’application d’un coefficient forfaitaire de décote qui varie en fonction de l’ancienneté du véhicule.
  • L’ouverture d’une fiscalisation des véhicules d’occasion, à partir du 1er janvier 2026, certes dans un périmètre limité, mais le principe est désormais acté et ne laisse aucun doute quant à son élargissement dans les années à venir !

L’ensemble de ces dispositions ne sont pas de nature à encourager l’achat d’un véhicule à motorisation électrique. La pression concurrentielle que pouvait jouer l’import de ces mêmes véhicules ne tient plus, et à terme se pose la question du sort des véhicules d’occasion qui étaient exonérés au moment de leur achat.

  • Soutenir la formation et l’attractivité des métiers 

Les évolutions technologiques rapides du secteur automobile nécessitent une montée en compétence des professionnels et des besoins en recrutement. La FNA constate :

  • Un besoin de formations adaptées aux nouvelles motorisations et technologies embarquées.
  • Des difficultés à attirer des jeunes vers ces métiers, souvent perçus comme physiques et peu valorisés.
  • Une nécessité de renforcer l’apprentissage et la formation continue, pour adapter les compétences aux évolutions du marché.

À travers cette rencontre à Matignon, la FNA poursuit son engagement en faveur d’une filière automobile forte, indépendante et résiliente. La Fédération appelle le gouvernement à agir rapidement pour garantir aux artisans de l’automobile les conditions nécessaires à leur survie et à leur développement.