Elaborer son Document Unique

L’évaluation des risques professionnels est une obligation permanente pour le chef d’entreprise, sous peine de sanctions. Le document unique doit être actualisé au moins une fois par an, et plus fréquemment à chaque action de prévention ou en cas d’aménagement modifiant les conditions de travail (nouvel outillage, changement de produits, etc.).

La démarche globale de prévention

L’employeur est tenu, en vertu de l’obligation générale de sécurité qui lui incombe, d’évaluer les risques éventuels et de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des salariés de son entreprise, dans un souci permanent d’éviter les accidents de travail et de réduire les maladies professionnelles.

La réglementation impose au chef d’entreprise de transcrire dans un « document unique » les résultats de l’évaluation des risques professionnels spécifiques à son entreprise (article R. 4121-1 du Code du travail).

Ainsi, le document unique comporte un « inventaire » des risques identifiés dans chaque unité de travail de l’entreprise, en prenant en compte tous les aspects liés au travail, et un programme d’actions de prévention à mettre en œuvre pour réduire ou supprimer la plupart des dangers constatés.

Notion d’unité de travail : pour établir le document unique, le chef d’entreprise doit définir un découpage de son entreprise en unités de travail. Cette notion d’unité de travail s’entend au sens large : il peut s’agir d’un découpage géographique (par atelier, par poste, …) ou d’un découpage par type d’activité, par métier, par produits utilisés…

Le document unique, un document évolutif

Rappelons que l’évaluation des risques professionnels se fait en plusieurs étapes :

  • Il faut commencer par identifier les risques, les situations dangereuses, en déterminant la gravité et la fréquence des dommages susceptibles d’en résulter, et la probabilité selon laquelle ces dommages risquent de survenir.
  • Ensuite, on devra choisir les risques à traiter en priorité et proposer, pour chaque risque identifié, les mesures de prévention à prendre pour limiter ou éliminer ce risque.
  • Enfin, un calendrier sera établi pour la mise en place des actions de prévention et de leur suivi. Chaque action de prévention qui aura été accomplie sera inscrite dans le document unique.

L’article R. 4121-2 du Code du travail prévoit que la mise à jour du document unique est effectuée au moins chaque année ainsi que lors de toute décision d’aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, ou lorsqu’une information supplémentaire concernant l’évaluation d’un risque dans une unité de travail est recueillie.

L’employeur qui n’a pas réalisé un Document Unique d’Évaluation des Risques (DUER) conforme ou une mise à jour au moins annuelle doit payer des dommages et intérêts à chacun de ses salariés !

La Cour de cassation a précisé que l’obligation de DUER n’est pas subordonnée à l’existence d’un risque particulier pour l’entreprise, et que les salariés peuvent demander une indemnisation au titre du non-respect patronal de cette obligation ! (Cour de cassation chambre sociale du 8 juillet 2014, pourvois n° 13-15470 et 13- 15474).

 Les entreprises de moins de 11 salariés peuvent faire une mise à jour « moins fréquente, sous réserve que soit garanti un niveau équivalent de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs » depuis la dernière actualisation (article L. 4121-3 du Code du travail).

Le document unique d’évaluation des risques professionnels et la loi « santé au travail  » N° 2021-2018 du 2 août 2021

Ce qui change avec la loi « santé au travail » 

  • Consultation désormais obligatoire du C.S.E (si existant) sur le D.U.E.R.P et ses mises à jour ;
  • Le D.U.E.R.P est renforcé. Il répertorie l’ensemble des risques professionnels auxquels sont exposés les travailleurs et assure la traçabilité collective de ces expositions. L’employeur doit transcrire et mettre à jour dans le DUER les résultats de l’évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs (nouvel art L 4121-3-1 CT).
  • Le D.U.E.R.P doit permettre à l’employeur de définir les mesures de prévention nécessaire.

1)Entreprises ≤ à 50 salariés : l’employeur définit des actions de prévention des risques et de protections des salariés, dont la liste est consignée dans le document unique ;

2) Entreprises ≥ à 50 salariés : l’employeur mettra en place un programme annuel de prévention des risques et d’amélioration des conditions de travail

  • Le D.U.E.R.P dans ses versions successives, sera conservé au moins 40 ans ;
  • Il sera transmis par l’employeur au S.P.S.T (médecine du travail)  auquel il est adhérent lors de chaque mise à jour ;
  • Il sera laissé à la disposition des salariés, anciens salariés et toute personne ou instance pouvant justifier d’un intérêt à y avoir accès ;
  • Création d’un portail numérique et mise à disposition du D.U.E.R obligatoire dès le 1er juillet 2023 pour les entreprises de 150 salariés et plus, puis graduellement (au plus tard le 1er juillet 2024)

Ces mesures entreront en vigueur au plus tôt le 31 mars 2022, beaucoup de décrets d’applications sont en attente.

L’obligation de sécurité pesant sur le salarié

La démarche de l’employeur vise également à sensibiliser les salariés à la prévention des accidents. « Conformément aux instructions qui lui sont données par l’employeur, il incombe à chaque travailleur de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celles des autres personnes concernées par ses actes ou ses omissions au travail » (article L. 4122-1 du Code du travail).

Quels sont les risques encourus ?

Depuis le 8 novembre 2002, l’employeur qui ne respecte pas son obligation d’élaborer ou de mettre à jour le document unique est passible d’une amende variant de 1 500 euros par unité de travail à 3 000 euros (toujours par unité de travail) en cas de récidive. En outre, l’employeur peut être condamné pour délit d’entrave si le document unique n’est pas mis à la disposition des représentants du personnel (CHSCT ou délégués du personnel). S’il refuse de tenir le document unique à la disposition de l’inspection du travail, il peut être sanctionné par une amende de 450 euros, ou même dans certains cas par les sanctions pénales prévues pour le délit d’obstacle à contrôle (jusqu’à 3 750 euros et/ou un an de prison, doublés en cas de récidive).

En cas d’accident, si la faute inexcusable de l’employeur a été retenue, « s’il avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour le protéger », les sanctions sont beaucoup plus lourdes (versement d’un capital ou d’une rente, et dommages et intérêts). En outre, l’employeur peut être condamné au pénal à un an d’emprisonnement et à 15 000 euros d’amende (45 000 euros en cas d’incapacité de travail supérieure à 3 mois), et l’entreprise peut être condamnée à verser 75 000 euros d’amende (225 000 euros en cas d’incapacité de travail supérieure à 3 mois).

L’absence, l’insuffisance, la non mise à jour du document unique d’évaluation des risques (DUER) et de la formation à la sécurité des salariés entraînent automatiquement la faute inexcusable de l’employeur en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle, soit à la demande de la caisse d’assurance maladie, soit à la demande du salarié ou des ayants droit.

Même en l’absence d’accident du travail, ces lacunes suffisent aujourd’hui à faire condamner un employeur.

Pour un accompagnement à la rédaction de votre document unique, voir sur le site www.fna.fr > Base documentaire, le document intitulé « Guide d’aide à l’élaboration du document unique ».

Ce guide détaille les étapes de l’évaluation des risques. Les « fiches » de risques et le questionnaire joints vous aideront à déterminer les risques présents dans votre entreprise et les mesures de prévention qu’il vous est possible de mettre en place.

QUELQUES EXEMPLES D’APPLICATION PRATIQUE

  • Détermination des Unités de Travail

L’unité de travail peut s’entendre d’un ou plusieurs poste(s) ou situation(s) de travail présentant les mêmes caractéristiques.

Par exemple, dans une entreprise automobile, le découpage peut se présenter comme suit :

  • Unité 1 – administrative et commerciale : personnel se situant dans les bureaux, le show-room ;
  • Unité 2 – Personnel de l’atelier mécanique, de la carrosserie, du contrôle technique ;
  • Unité 3 – Personnel de l’activité dépannage ;
  • Hiérarchiser les risques

La fréquence d’exposition est un élément déterminant dans l’évaluation des risques. Exemple :

  1. Rare : Quelques que fois dans l’année ;
  2. Occasionnel : Quelques fois dans le mois, dans la semaine ;
  3. Fréquent : Tous les jours (même 5 minutes par jour) ;
  4. Très Fréquent : + de 4 heures par jour.

La gravité

  1. Faible : Accident sans arrêt de travail ;
  2. Moyenne : Arrêt de travail de moins d’une semaine ;
  3. Forte : Arrêt de travail de plus d’une semaine ;
  4. Très forte : Possibilité d’invalidité permanente, de handicap, de décès.

Pondération du risque en fonction des mesures de protection mises en place

  1. Consignes verbales ;
  2. Mise en place d’équipements de protection individuelle ;
  3. Mise en place de protections collectives (vérifications, formations….) ;
  4. Mise en place de mesures supprimant l’intervention de l’homme ;
  • Calcul du risque

Pour calculer le risque, il convient d’utiliser la formule suivante :(Fréquence x Gravité) – Pondération

Exemples d’analyses de situations dans votre garage

Poste de travail : Atelier – Utilisation de pont élévateur

Poste de travail : Atelier – Utilisation de la cabine de peinture

A quoi peut ressembler la rédaction du Document Unique ?

Les actions de prévention seront à définir par le chef d’entreprise afin de réduire le niveau de risque qui aura été déterminé par la cotation (après calcul du risque). Ces actions devront être indiquées dans la colonne « actions à mettre en place » de votre document unique.  Il faudra également indiquer la date de leur mise en œuvre et le nom de la personne chargée de les faire appliquer dans la partie « commentaires ».

Les actions de prévention seront à définir par le chef d’entreprise afin de réduire le niveau de risque qui aura été déterminé par la cotation (après calcul du risque). Ces actions devront être indiquées dans la colonne « actions à mettre en place » de votre document unique.  Il faudra également indiquer la date de leur mise en œuvre et le nom de la personne chargée de les faire appliquer dans la partie « commentaires ».