Le professionnel de l’automobile peut voir sa responsabilité civile professionnelle (RCP) engagée dans le cadre de son activité. Schématiquement, l’activité du réparateur s’articule autour de trois axes : la vente du véhicule, l’entretien et la réparation du véhicule, et enfin la garde du véhicule réparé. Ces activités peuvent générer des dommages pouvant engager sa responsabilité civile.
Le garagiste est soumis à une obligation de résultat sur le fondement de l’article 1231-1 du code civil. Il est tenu de remettre en parfait état de marche le véhicule qui lui a été confié.
La jurisprudence est allée encore plus loin en affirmant que le réparateur est présumée responsable des problèmes qui peuvent survenir après son intervention – à charge pour lui d’apporter la preuve qu’il n’a commis aucune faute dans la première réparation ou qu’il n’y a aucun lien entre sa faute présumée et le dommage subi par le client.
Pour s’exonérer de sa responsabilité, le réparateur doit faire preuve de la plus grande vigilance. Nous allons passer au crible les différents cas de figures pouvant se présenter en s’appuyant sur des exemples concrets.
Etendue de l’obligation de résultat du réparateur
- Une seconde intervention est nécessaire pour une panne identique ou sur une pièce changée lors de la première panne
Le réparateur a manifestement manqué à son obligation de résultat. Sa responsabilité est engagée. Il ne pourra s’exonérer de sa responsabilité que s’il arrive à prouver que le dommage subi par le client ne lui est pas imputable.
Jurisprudence Cass Civ 1ère, 28 janvier 2010 La Cour de Cassation approuve les juges du fond d’avoir constaté que « la réparation effectuée par la société X pour remédier aux désordres ne les avait pas fait disparaître, caractérisant ainsi le manquement de celle-ci à l’obligation de résultat à laquelle elle était tenue à l’égard de son client ». Cass Civ 1ère, 17 mars 2011 La Cour de Cassation a rappelé sa jurisprudence constante : « Le garagiste est tenu d’une obligation de résultat en ce qui concerne la remise en état du véhicule qui lui est confié ; que le tribunal qui, bien qu’il ait constaté qu’après avoir été confié pour réparation une première fois à la société X, en avril 2007, le véhicule de M.X avait, en août 2007, rencontré une panne quelque peu similaire à la précédente, ce dont il résultait que le garagiste avait manqué à son obligation de résultat relative à la remise en état du véhicule, a néanmoins jugé que ce dernier n’avait pas commis de faute, n’a pas tiré les bases légales de ses constatations, et a ainsi violé les articles 1147 et 1787 du Code civil » |
- La seconde intervention concerne un organe différent de celui sur lequel a été réalisée la première
La responsabilité du réparateur est présumée. Il appartient au client lésé de démontrer que le dommage trouve son origine dans la première prestation de réparation (Cass Civ 1ère 22 mai 2008)
En pratique, il est évident que si la panne intervient peu de temps après ladite réparation, l’imputabilité sera présumée. Pour établir cette responsabilité, un rapport d’expertise soumis aux débats est nécessaire.
Jurisprudence Juridiction de Proximité d’Evry, 6 décembre 2010 Un garage s’est vu confier un véhicule en réparation en vu du changement du roulement de la roue arrière droite. Le propriétaire estimant que la pièce changée a présenté une usure prématurée, a demandé au professionnel de lui remplacer à nouveau et de lui rembourser le prix de la pièce initialement changée. Les juges ont estimé que le demandeur ne démontrait pas que le dommage subi trouvait son origine dans l’organe sur lequel le garagiste est intervenu. La responsabilité qui pèse sur le réparateur ne s’étend qu’aux dommages causés par le manquement du professionnel à son obligation de résultat. « sa responsabilité ne saurait être engagée s’il existe un doute sur le lien de causalité entre l’éventuelle défectuosité de la réparation et le dommage subi ; que la valeur des éléments de preuve soumis et l’interprétation d’indices relèvent de l’appréciation du juge saisi ». En l’espèce, le véhicule avait parcouru beaucoup de kilomètres entre la réparation initiale et la nouvelle panne. |
La responsabilité du garagiste est donc présumée toutes les fois que le client prouve qu’il a subi un dommage qui a pour origine l’organe sur lequel le réparateur est intervenu.
Le garagiste est responsable des pièces et autres produits utilisés lors de l’exécution de son obligation de réparation et d’entretien.
D’une façon générale, le garagiste est responsable des défauts des pièces utilisées (article 1641 du code civil) et peut même être poursuivi pour tromperie s’il facture le prix d’une pièce neuve alors qu’il a utilisé une pièce d’occasion (Cass Crim, 3 décembre 1997).
Le garagiste doit indemniser son client pour l’ensemble du préjudice subi :
Le réparateur doit bien sûr remettre le véhicule en état de marche à ses frais. Cela implique d’une part, la réparation de l’organe défectueux à l’origine de la panne mais également toutes les pièces endommagées suite à cette défaillance. D’autre part, il doit aussi indemniser le client pour toutes les dépenses occasionnées par la réparation défectueuse
Il peut s’agir :
- des frais résultant de l’immobilisation et du dépannage du véhicule
- et éventuellement de sa dépréciation,
- des honoraires de l’expert,
- des frais de location d’un autre véhicule,
- ou encore des dommages causés à un tiers si le véhicule mal réparé est impliqué dans un accident sur le fondement de son obligation de sécurité.
Jurisprudence Le principe : Dans un arrêt de principe du 16 février 1954, la Cour de Cassation a établi « qu’une fois le dommage déterminé dans sa nature et dans son étendue, il importe uniquement d’assurer à la victime une indemnisation intégrale par le versement de l’équivalent monétaire dudit dommage au jour de sa réparation ». Illustration : Cass. civ, 1ère, 8 décembre 1998 : Même si la première réparation a été effectuée par un réparateur dans le cadre de la garantie contractuelle, si celui-ci n’a pas réussi à remettre en état de marche le véhicule, il peut être condamné à payer le coût de la réparation réalisée ultérieurement par un autre réparateur. |
Les causes d’exonération de responsabilité du réparateur
L’obligation de résultat mise à la charge du garagiste est parfois atténuée. Le juge, en fonction des éléments qui lui sont soumis, peut l’exonérer de sa responsabilité s’il parvient à prouver qu’il n’a pas commis de faute lors de son intervention ou que la panne en cause n’a pas de lien de causalité avec le travail qu’il a effectué.
Les cas de figure les plus courants :
- Obligation de résultat limitée aux réparations acceptées par le client :
Jurisprudence Cass Civ 1ère, 14 juin 2007 La Cour de Cassation a jugé au visa de l’article 1787 du Code civil relatif aux devis, « que si le garagiste est tenu d’une obligation de résultat en ce qui concerne la remise en état du véhicule qui lui est confié, cette obligation ne s’étend qu’aux réparations convenues entre les parties. Attendu que pour condamner la société X à procéder à l’installation d’un équipement neuf au frais du client, l’arrêt attaqué retient que, pour le remplacement de la boite de vitesses défectueuse, le garagiste était tenu d’une obligation de résultat. Qu’en se déterminant ainsi alors qu’il ressort de l’arrêt attaqué que Monsieur X avait refusé le remplacement de l’organe défaillant par une pièce neuve, la cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constations, a violé le texte susvisé ». |
Attention : le garagiste doit prouver que son client a refusé certaines réparations. Vous devez en ce sens prouver que vous l’avez bien informé de la nécessité d’effectuer ses réparations.
Il est très important de conserver les ordres de réparations, les décharges de responsabilités, les factures …..
- Le réparateur a suivi scrupuleusement les instructions du constructeur :
Jurisprudence : responsabilité partagée avec le constructeur. Cour d’Appel d’Aix en Provence, 13 novembre 2008 Un garage dont la responsabilité était mise en cause par un client, a introduit un recours contre le constructeur, en invoquant un manquement à son obligation d’information complète vis-à-vis de son agent. Les préconisations techniques du constructeur au moment de la panne incriminée n’étaient pas obligatoires, comme cela a été le cas ultérieurement. Le garage avait travaillé sur la base d’une documentation mise à jour périodiquement. Les juges ont retenu que certes il appartenait au garage en qualité de professionnel de la réparation de suivre les règles de l’Art. Néanmoins, il devait également mettre en œuvre les préconisations ou notices techniques du constructeur et pouvait alors légitimement penser qu’elles correspondaient aux règles de l’Art. Le constructeur en fournissant au réparateur, des préconisations insuffisantes, a contribué à la réalisation des dommages. Le constructeur a été condamné à payer 50% des dommages subis par le client. |
Il est dans votre intérêt de conserver les notices et les préconisations des constructeurs.
- Le réparateur a apporté tous les soins nécessaires.
Cour d’appel d’Agen, 7 avril 2008 / Cass. Civ. 1ère 12 Janvier 1994.
- Le dommage postérieur à son intervention, est dû à une faute du client :
Défaut d’entretien, l’utilisation de produits dangereux,
- L’absence de lien de causalité entre la panne et son intervention :
Nous sommes dans le cas de figure où la panne survenue après son intervention a certes pour origine la pièce sur laquelle il est intervenu, mais aucun lien de causalité n’existe avec cette intervention.
Pour le prouver, il est plus que recommandé de faire appel à un expert, de participer aux expertises mandatées par la partie adverse …..
Les juges du fond ont exonéré des professionnels au cas par cas en tenant compte notamment de l’usure normale des pièces, du nombre de kilomètres effectués depuis la réparation ….
Le temps joue en faveur du garagiste car il crée un doute à propos du lien de causalité. Le client devra en effet prouver, pour engager sa responsabilité, qu’il a commis une faute et que cette faute est la cause immédiate et directe du dommage qu’il a subi.
Cour d’Appel d’Aix en Provence, 17 décembre 2008
Le garagiste peut s’exonérer de l’obligation de résultat qui pèse sur lui, sur le fondement de ce texte, en démontrant son absence de faute. Un garagiste effectue une première réparation. Peu de temps après le véhicule tombe en panne. Le rapport d’expertise a établi que le garagiste n’avait commis aucune faute. « La rupture de l’arbre de transmission étant due à son usure qui n’était pas décelable lors de la réparation demandée par la cliente ». Dans le même sens : Absence de lien de causalité : Juridiction de Proximité d’Evry, 6 décembre 2010 (cité plus haut) |