Auto-entrepreneur : attention au risque de requalification en CDI

Vous hésitez entre une embauche dans le cadre d’un contrat de travail ou le recours à un contrat de mission auto-entrepreneur.

Si dans les deux cas le but poursuivi est similaire (réalisation d’un travail contre rémunération), faites vous la différence entre ces deux types de contrat ? Afin de vous éviter un contentieux, nous avons collecté les informations qui vous permettront faire votre choix en toute connaissance de cause.

Petit rappel juridique sur les éléments constitutifs du contrat de travail

Le contrat de travail se définit de la manière suivante pour la Cour de cassation : c’est une convention par laquelle une personne physique, le salarié, s’engage à mettre son activité à la disposition d’une autre personne physique ou morale, l’employeur, sous la subordination de laquelle elle se place, moyennant une rémunération. Ce type de contrat est très encadré par le code du travail, de la sécurité sociale et la convention collective applicable.

3 éléments sont indispensables pour le constituer : une prestation de travail, une rémunération et un lien de subordination.

Le lien de subordination est l’élément déterminant de la reconnaissance du contrat de travail, l’employeur étant le donneur d’ordres et de directives, il a un pouvoir de direction sur le salarié lui permettant de contrôler l’exécution de son travail, de le sanctionner …

Le contrat passé avec un auto-entrepreneur

On ne parle pas de contrat de travail, mais de contrat de prestation de services, qui est un contrat d’entreprise ou de louage d’ouvrage, régit par l’article 1710 du Code civil : le louage d’ouvrage est un contrat par lequel l’une des parties s’engage à faire quelque chose (une prestation technique ou intellectuelle) pour l’autre, moyennant un prix convenu entre elles.

Par conséquent, le lien de subordination, primordial dans le cadre d’un contrat de travail, n’existe pas avec le contrat de prestation de service, l’auto-entrepreneur exerce son activité en toute indépendance et n’a aucun lien de subordination avec son client. L’auto-entrepreneur a une obligation de résultat et exécute sa prestation en toute liberté quant aux moyens mis en œuvre pour y parvenir.

La terminologie est donc bien distincte : dans le cadre du contrat de travail on parle d’employeur et de lien de subordination, pour le contrat de mission on parle de client et d’indépendance.

Comment faire la différence entre le contrat de mission et le contrat de travail ?

Il existe des faisceaux d’indice qui vous permettront non seulement de mieux appréhender le contrat dont vous avez besoin, mais surtout éviteront une requalification du contrat de mission en contrat de travail.

Vous avez mis en place un contrat de mission avec un auto-entrepreneur, mais à lecture du contrat et surtout des conditions réelles d’exécution de celui-ci, il apparaît que les éléments essentiels ne sont pas respectés et qu’une requalification est possible avec des conséquences financières importantes pour le client.

Posez vous les bonnes questions pour éviter la requalification

  • Le prestataire utilise-t-il son propre matériel pour l’exécution des missions ? L’utilisation exclusive du matériel de l’entreprise est un indice négatif ;
  • Travaille-t-il pour plusieurs clients ou êtes-vous le client « unique » du prestataire ? Avoir plusieurs clients est un gage d’indépendance, un seul client est un indice négatif ;
  • Peut-il organiser son travail à sa convenance, soit décider comment, quand il va fournir sa prestation ?
  • L’auto-entrepreneur travaille dans les mêmes conditions de travail qu’un salarié (doit il respecter des horaires, des consignes précises…) ? Imposer les horaires collectifs des salariés de l’atelier, du bureau ne reflète pas l’aspect « indépendance » du prestataire ;
  • Fixe-t-il librement ses prix ? Imposer des prix sans aucune discussion – négociation, est un signe de non indépendance ;
  • La facture se fait elle à la mission ou au nombre d’heures ou de jours ? En général la facture se fait à la mission  ;
  • A-t-il la possibilité de développer une clientèle extérieure sans contrainte ?
  • Les interactions entre l’autoentrepreneur et vos salariés sont-elles limitées aux seuls besoins de l’exécution de la prestation ? Il faut éviter que soit initiée une relation et un contrôle hiérarchique des salariés à son égard.

Si les « non » sont majoritaires, il y a un grand risque de requalification du contrat de mission en contrat de travail.

Qui peut être à l’initiative de la demande de requalification ?

L’auto-entrepreneur peut saisir le Conseil des prud’hommes.

L’administration à l’occasion d’un contrôle (inspection du travail, URSSAF, services fiscaux) peut saisir le procureur de la république.

Les conséquences d’une requalification en contrat de travail

Conséquences sur le plan civil : vous devrez supporter les conséquences liées à une requalification de la relation en contrat de travail et vous pourriez être condamné à verser des rappels de salaires, heures supplémentaires, primes, indemnité compensatrice de préavis, indemnité légale ou conventionnelle de licenciement, indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, congés payés, indemnité pour travail dissimulé … correspondant à un poste de salarié équivalent, depuis le début avéré de la relation de travail.

Conséquences sur le plan pénal : vous vous exposerez à des sanctions pour travail dissimulé (article L8221-5 du Code du Travail)

L’Urssaf serait quant à elle, en droit d’appliquer des redressements de cotisations et majorations de retard pour toute la durée de la relation de travail