Véhicules abandonnés : quelles procédures ?

Le réparateur automobile (ou le dépanneur / remorqueur) dont le client ne vient pas chercher son véhicule après l’exécution de sa prestation est confronté à une double difficulté : obtenir le paiement de la facture et se « débarrasser » du véhicule.

La loi du 31 décembre 1903 lui offre une solution adaptée à cette double préoccupation à condition de respecter un certain formalisme.

En effet, le garagiste dispose de la possibilité de former une requête devant le juge du Tribunal Judiciaire pour qu’il fasse procéder à la vente aux enchères du véhicule (véhicules terrestres à moteur, motocycles à deux ou trois roues ou quadricycles à moteur).

En revanche, lorsque le véhicule est de faible valeur et son propriétaire inconnu, le réparateur peut avoir intérêt à se débarrasser au plus vite du véhicule, notamment lorsqu’aucun travaux n’a été réalisé sur le véhicule. La procédure des véhicules abandonnés, prévue aux articles L 325-12, R 325-47 à R 325-51 du Code de la route peut alors s’appliquer.

Vente aux enchères d’un véhicule abandonné dans un garage

Un véhicule confié à un réparateur pour « être travaillé, façonné, réparé ou nettoyé » qui n’aurait pas été retiré dans le délai de 3 mois, peut être vendu aux enchères publiques. Cependant, cette procédure n’a d’intérêt que si le propriétaire du véhicule n’a pas réglé sa facture et/ou vous doit des frais de gardiennage.

Point de départ de la procédure ?

Le réparateur qui se trouve confronté à un véhicule non réclamé dans son garage doit pouvoir démontrer la réalité de la créance (par un ordre de réparation ou un devis signés) et d’un abandon du véhicule depuis plus de trois mois.

L’article 1 de la loi du 31 décembre 1903, relative à la vente de certains objets abandonnés, par son imprécision, laisse à penser que le délai court à partir du moment où le véhicule est confié, c’est-à-dire à partir du moment où il est remis entre les mains du « garagiste ».

C’est pourquoi, il est recommandé de considérer que le délai pour agir est de 3 mois à partir de la date de retrait du véhicule, convenue entre les parties. Il est donc recommandé de la faire figurer sur l’ordre de réparation. C’est à partir de cette date, que le véhicule est considéré comme mis à la disposition du client.

Dans le cas où cette date de retrait n’a pas été mentionnée, pour éviter tout conflit, nous vous recommandons d’adresser, à votre client, une lettre de mise en demeure en recommandé avec demande d’avis de réception.

Dans cette lettre, vous devrez formuler :

1. Votre mise en demeure de payer le montant des réparations effectuées et les frais de gardiennage, dont vous préciserez les montants (avec les justificatifs),

2. Votre intention de former une requête devant le juge du tribunal judiciaire à l’expiration du délai légal de 3 mois, à compter de la réception de la présente lettre pour qu’il fasse procéder à la vente du véhicule.

A noter Les réparateurs peuvent également utiliser cette procédure lorsqu’un véhicule est présent dans le garage dans le cadre d’un stationnement payant. Dans cette hypothèse, le délai de 3 mois commence à courir à compter de la dernière échéance de loyer impayée.

Précision importante : si le propriétaire du véhicule ne récupère pas ce courrier recommandé (non réclamé ou refusé), vous devez à vos frais faire signifier cette mise en demeure par un commissaire de justice (ex-huissier de justice).

Procédure pour un véhicule ayant une certaine valeur vénale

Un avocat est-il obligatoire devant le tribunal judiciaire ?

  • Si la demande globale dépasse la somme de 10.000 € (factures impayées + frais de gardiennage + autres frais), le recours à un avocat pour saisir le juge est obligatoire devant le tribunal judiciaire.
  • Si la demande globale est inférieure à la somme de 10.000 € (factures impayées + frais de gardiennage + autres frais), le recours à un avocat pour saisir le juge n’est pas obligatoire devant le tribunal judiciaire.

Etape 1

Le réparateur doit présenter au juge du tribunal judiciaire, du lieu où est situé son garage une requête, c’est-à-dire une simple lettre (à déposer au greffe du tribunal contre récépissé ou à envoyer en recommandé avec accusé de réception) indiquant certaines mentions obligatoires :

    • Les faits avec tous les justificatifs en possession du réparateur (Tels que l’ordre de réparation signé/ devis signé, le certificat d’immatriculation, les factures, le double de la lettre de mise en demeure et son AR)
    • La date de réception du véhicule;
    • La désignation du véhicule;
    • Le prix demandé pour les réparations;
    • Le nom du propriétaire du véhicule;
    • Le lieu où le véhicule a été confié.

Retrouvez ce modèle dans la rubrique « documents complémentaires » en bas de page

⇒ Vous devez informer le propriétaire du véhicule de cette démarche : soit par LRAR, soit par commissaire de justice en mentionnant en gras et clair qu’il peut faire toute observation dans les 15 jours de la réception de la copie de la requête, auprès du greffe de la chambre civile (en lui communiquant les coordonnées du greffe). 

⇒ pour résumer, la procédure doit être réalisée en 2 temps : une mise en demeure d’avoir à retirer le véhicule puis après un délai de 3 mois sans nouvelles, une saisine du tribunal judiciaire qui sera en même temps notifiée au propriétaire par LRAR ou signifiée (par commissaire de justice) pour lui permettre de formuler ses observations.

Etape 2

Le juge rend une ordonnance après que le propriétaire a été entendu ou appelé à comparaître pour faire valoir ses droits.

Dans son ordonnance, le juge fixera le jour, l’heure et le lieu de la vente du véhicule et désignera l’officier public (commissaire de justice) chargé de réaliser la vente.

Etape 3

Un dernier recours est ouvert au propriétaire du véhicule : le commissaire de justice chargé de la vente doit le prévenir par courrier en recommandé avec accusé de réception 8 jours avant la vente en précisant les lieu, jour et heure de la vente.

Le propriétaire du véhicule peut alors former une opposition à la vente en citant le réparateur devant le juge du tribunal judiciaire par exploit de commissaire de justice.

Etape 4

La mise en vente aux enchères publiques : le produit de la vente sert à payer le réparateur, après déduction des frais. Le solde éventuel est versé sur un compte, ouvert au nom du propriétaire du véhicule, à la Caisse des dépôts et consignations.

Attention : Lorsque le produit de la vente est insuffisant pour couvrir les frais qu’elle a occasionnés, la différence doit être payée par le réparateur qui devra se retourner contre le propriétaire, en espérant qu’il puisse le retrouver et que ce dernier soit solvable. Le réparateur doit donc éviter d’utiliser cette procédure si la valeur du véhicule est faible, de surcroît si les chances de retrouver son propriétaire sont minces.

Procédure pour un véhicule sans valeur vénale

Le professionnel doit demander à l’officier de police judiciaire, territorialement compétent (commissariat de police, gendarmerie), de prononcer la mise en fourrière du véhicule ; en y joignant la justification que le propriétaire du véhicule a été mis en demeure de retirer son véhicule.

La mise en fourrière est effectuée sous la responsabilité du professionnel.

Frais de parking

Pour pouvoir facturer de tels frais, le réparateur doit mentionner leurs coûts et leurs conditions d’application dans l’ordre de réparation et dans les tarifs, obligatoirement affichés à l’entrée des locaux et lieux de réception de la clientèle. Cliquez ici pour accéder à la note sur les frais de gardiennage.

Enlèvement d’un véhicule laissé sans droit dans un garage

Un véhicule a été abandonné dans votre garage, soit suite à un dépannage, soit suite à un devis auquel le propriétaire n’a pas donné suite. Il ne présente pas de valeur, et une mise en vente aux enchères (voir plus haut) ne permettrait pas de couvrir les frais.

Dans ce cas, le réparateur (ou plus généralement toute personne) agissant en tant que « maître de lieux privés » (c’est-à-dire propriétaire, gérant ou locataire), où ne s’applique pas le Code de la route, peut demander, sous sa responsabilité, la mise en fourrière, la vente ou éventuellement la destruction d’un véhicule laissé sans droit dans son garage.

Vous devez procéder par étape selon que le propriétaire du véhicule est connu ou inconnu.

Vous connaissez le propriétaire du véhicule 

Pour la demande de mise en fourrière, et dans la mesure où les propriétaires sont connus, c’est le code de la route qui prévoit la marche à suivre.

  • Adresser un courrier en LRAR au propriétaire du véhicule, le mettant en demeure de venir récupérer le véhicule sous 8 jours. Vous pouvez adapter le courrier à chacune des situations (par exemple, précisez que vous lui avez demandé de nombreuses fois par téléphone de venir récupérer son véhicule si c’est le cas).

Retrouvez ce modèle dans la rubrique « documents complémentaires » en bas de page

  • Si le propriétaire ne vient pas chercher son véhicule sous 8 jours ou s’il ne retire pas la LRAR ou si celle-ci vous revient avec la mention NPAI, il faut adresser un courrier à l’officier de police judiciaire territorialement compétent (conformément à l’article 16 du code de procédure pénale, sont officiers de police judiciaire : le maire et ses adjoints, les officiers et les gradés de la gendarmerie nationale ou de la police nationale. …). Ce courrier a pour objet de demander à l’OPJ la mise en fourrière du véhicule dont le propriétaire est connu.

Retrouvez ce modèle dans la rubrique « documents complémentaires » en bas de page

  • A ce courrier, il faudra joindre la copie du courrier de mise en demeure que vous avez déjà adressé au propriétaire du véhicule.
  • L’officier de police judiciaire vérifie l’identité du propriétaire du véhicule, avant de prescrire la mise en fourrière.
  • Lorsque l’OPJ a pu identifier le propriétaire du véhicule, il lui notifie la mise en fourrière de son véhicule.
  • La mise en fourrière est effectuée sous la responsabilité du maître des lieux (c’est-à-dire du professionnel), qui n’aura aucun frais à engager.

Vous ne connaissez pas le propriétaire du véhicule

Pour la demande de mise en fourrière, et dans la mesure où les propriétaires sont inconnus, c’est le code de la route qui prévoit la marche à suivre.

  • Adresser un courrier à l’officier de police judiciaire (Conformément à l’article 16 du code de procédure pénale, sont officiers de police judiciaire : le maire et ses adjoints, les officiers et les gradés de la gendarmerie nationale ou de la police nationale. …). Ce courrier a pour objet de demander à l’OPJ la mise en fourrière du véhicule dont le propriétaire est inconnu.

Retrouvez ce modèle dans la rubrique « documents complémentaires » en bas de page

  • A ce courrier, il faut joindre une enveloppe vierge, affranchie au tarif d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception (les frais d’expédition sont à la charge du demandeur).
  • L’officier de police judiciaire procèdera, alors lui-même, à la mise en demeure du propriétaire, sur le fondement de l’article R. 325-49 du Code de la Route
  • Le propriétaire est informé et peut retirer le véhicule à ses frais.
  • A défaut de retrait du véhicule, l’OPJ peut ordonner la mise en fourrière qui est effectuée sous la responsabilité du maître des lieux (c’est-à-dire du professionnel), qui n’aura aucun frais à engager.

Il est vivement conseillé de ne pas hésiter à adresser un courrier aux clients qui ne viennent pas récupérer leur véhicule (lorsqu’ils sont connus).

Attention : Ces deux régimes juridiques sont complexes. Afin d’éviter un litige ultérieur avec le propriétaire du véhicule, pour les véhicules confiés, il convient de respecter, en outre, le délai de 3 mois entre la première demande de retrait du véhicule et la mise en demeure de récupérer le véhicule sous 8 jours avant mise en fourrière

 

Nous avons des retours terrains nous informant que certains OPJ ne connaissent pas cette procédure et / ou informent le professionnel qu’ils ne peuvent intervenir que sur la voie publique et ne sont pas compétents pour les lieux dit « privés » (exemple : garage, copropriété, etc …). N’hésitez pas dans ce cas à leur transmettre les dispositions du code de la route et notamment l’article R. 325-47 : « Le maître de lieux publics ou privés où ne s’applique pas le code de la route qui veut faire procéder à l’enlèvement d’un véhicule laissé sans droit dans ces lieux en adresse la demande à l’officier de police judiciaire territorialement compétent ».

Cliquez ici pour retrouver l’intégralité des dispositions du code de la route sur l’enlèvement des véhicules laissés sans droit dans des lieux non ouverts à la circulation publique.

Cas particulier : 

Véhicules abandonnés en fourrière

Les véhicules laissés en fourrière, après un délai de 15 jours à compter de la notification de mise en fourrière, sont considérés comme abandonnés.

Ce délai est ramené à 10 jours, si la valeur du véhicule est estimée à un faible montant déterminé en tenant compte de ses caractéristiques techniques, de sa date de première mise en circulation et, le cas échéant, des motifs de sa mise en fourrière (la valeur de  765 € n’est plus d’actualité). Ce délai peut également être ramené à 7 jours si le véhicule a été utilisé pour du rodéo urbain.

Ils sont alors remis au service des domaines  pour être vendu ou détruit (articles L 325-7, L 325-8 et R 325-43 du code de la route).

La notification de mise en fourrière est adressée par lettre recommandée avec accusé de réception au propriétaire, dans les 5 jours suivant la mise en fourrière, par un officier de police judiciaire (OPJ) ou par l’autorité dont relève la fourrière.

Le « fouriériste » n’a donc en principe rien à faire. Néanmoins, si à l’expiration du délai de 15 jours, il reste sans nouvelle il peut toujours saisir cette autorité pour qu’elle prenne position.

 

Tous les documents types et modèles de courriers pour la procédure des véhicules abandonnés sont à votre disposition ci-dessous dans l’onglet ci-dessous « documents complémentaires ».