Plan d’action industrielle pour le secteur automobile européen

La Commission européenne a présenté un plan en faveur de la filière automobile par la voix de Stéphane Séjourné, vice-président l’institution. Il a présenté les risques qui pèsent sur la filière confrontée à des transformations rapides et structurantes. Les nouveaux véhicules intègrent désormais des services numériques telles que l’IA, des logiciels, une connectivité accrue …. Dans ce contexte, pour rester efficient, l’accès aux matières premières, la maîtrise de l’approvisionnement et des coûts sont essentiels. Le plan présenté repose sur 5 piliers que nous vous commentons dans cette note.

1. Innovation et Numérisation

Pour être compétitive à l’échelle mondiale, l’industrie automobile européenne doit de toute urgence retrouver une position de leader dans la transition vers des véhicules connectés et autonomes, dotés de logiciels et d’intelligence artificielle. L’expérience embarquée, tant pour les conducteurs que pour les passagers, est de plus en plus définie par logiciel, avec de nouvelles applications, telles que la conduite automatisée et autonome, la communication …

Parmi les actions envisagées, la FNA accueille favorablement :

  • Des mesures d’harmonisation au niveau européen concernant la conduite automobile incluant les ADAS, la conduite autonome notamment avec des bancs d’essai mutualisés
  • Mise en place d’une alliance européenne pour les véhicules connectés en tenant compte des contraintes concurrentielles entre les acteurs, sous réserve d’associer les représentants des TPE PME des services de l’automobile,

En revanche, la FNA attends des actes concrets pour garantir un accès aux données et fonctions ressources du véhicule, notamment les données générées ou dit autrement, les données d’usage issues du véhicule connecté.

Le marché de la donnée que le DATA ACT renforce, n’est pas suffisant pour notre secteur. Or, ces données joueront, comme le rappelle le plan, un rôle déterminant pour créer de nouvelles sources de revenus. La FNA demande à la Commission d’aller plus vite dans l’adoption du DATA ACT AUTO, les acteurs économiques allant plus vite que le Législateur.

Toujours s’agissant de la réglementation européenne, la Commission a avancé plus vite que prévu la révision du règlement d’exemption par catégorie applicable au secteur de l’automobile ; le RECSA. Ce texte est très important car il encadre certaines pratiques des réseaux constructeurs notamment sur le marché de la réparation, pièces incluses. Sans rentrer dans les détails la FNA se bat pour que les acquis des réglementations antérieures ne soient pas remis en cause (accès aux données, rôle joué par la filière indépendante) et plus généralement que les réformes à venir intègrent bien les nouveaux besoins de notre filière (accès aux intrants essentiels dont les données générées par les véhicules, réparabilité, accès aux pièces et composants, formation).

2. Mobilité propre

La vente des véhicules neufs électriques n’est pas à la hauteur des objectifs que c’était fixé la Commission Européenne. Les cibles identifiées dans le plan sont les personnes à revenu modestes par des dispositifs de leasing social, le renouvellement des flottes automobiles et le parc des véhicules lourds. La FNA rappelle aussi que le vrai enjeu de la transition écologique est la prise en compte du parc roulant. Les véhicules neufs (VN) années après années; sont peu nombreux en volume et l’âge moyen d’un achat d’un VN est de 54 ans. Le prix d’un véhicule électrique est inaccessible pour beaucoup de consommateurs.

Les mesures du plan visant à mieux coordonner les systèmes d’incitation des Etats Membres est une bonne chose. En France, l’un des freins reste les nombreux changements de la Législation qui n’encouragent pas notamment les entreprises et les usagers à prendre des décisions sur le long terme. L’entrée en vigueur des mesures est souvent trop rapides ne laissant pas le temps aux professionnels de s’adapter, d’autant que bien souvent, les demandes d’immatriculation des ventes réalisées sur le dernier trimestre de l’année n -1 ne sont pas encore traitées par l’ANTS. Or, la fiscalité applicable est celle en vigueur en date de l’édition du titre. Le délai médian pouvant parfois dépasser plusieurs semaines, l’usager peut se retrouver à régler des sommes conséquentes. Dans un contexte où le malus automobile s’alourdit surtout en 2025, de nombreux automobilistes en font les frais. Tous ces facteurs alimentent le report d’un achat en neuf ou en occasion, l’âge du parc étant de 13 ans en 2025 avec 60.25% des véhicules soumis au contrôle technique de plus de 10 ans.

A cela s’ajoute, une prise de conscience collective concernant la réparabilité et la durabilité des véhicules électriques et notamment des batteries. Ces véhicules semblent en outre perdre rapidement de la valeur. La FNA trouve la Commission européenne très timorée et réitère ces demandes concrètes pour le secteur et les consommateurs.

3. Compétitivité et résilience dans la chaine d’approvisionnement

La chaîne d’approvisionnement est essentielle à la viabilité économique de la filière de distribution des véhicules neufs mais aussi et surtout des services de l’automobile.

L’Europe doit rester compétitive mais pour cela, certaines mesures devraient être prises dans :

  • La production des batteries électriques en Europe, le plan est encourageant sur ce point,
  • La fabrication de ses composants et cellules y compris tout au long de la durée de vie du véhicule électrique, ce qui suppose un renforcement de la réglementation (délai légal de mise à disposition des pièces nécessaires à la réparabilité de la batterie, interdiction de la sérialisation des pièces, ….). La Commission européenne semble se situer uniquement sur la fabrication du véhicule et non pas sur sa réparation.
  • La recyclabilité des batteries est également un enjeu majeur. La filière du recyclage des véhicules en fin de vie nécessite un investissement plus important. Un centre VHU doit pouvoir disposer des batteries et avoir une procédure clairement définie (et non pas constructeur par constructeur) pour leur déconstruction ou leur réparabilité. La batterie représente 30 à 40 % de la valeur du véhicule. L’indépendance de l’Europe repose sur notre capacité à réinjecter les batteries et leur composant dans l’économie circulaire. Le plan en ce sens semble avoir pris la mesure des enjeux.
  • Le parc roulant essentiellement thermique et pour longtemps, a des besoins en fabrication de pièces et de composants. Les services de l’automobile pourront encaisser les transitions s’ils sont en mesure de poursuivre l’entretien et la réparation des véhicules déjà immatriculés même récents. Trop de véhicules sont actuellement en attente de pièces. C’est une lacune du plan.

4. compétence et dimension sociale

L’impact sur l’emploi et l’employabilité des actifs doit devenir une priorité. Le plan reconnaît le rôle primordial joué par les partenaires sociaux. Notre branche professionnelle est l’une des plus actives et à toujours su, dans le respect de chacune des organisations, anticiper les changements et mettre des moyens conséquents pour former les salariés. Les différents dispositifs compétences emploi en sont la preuve. Face à l’ampleur des changements et la rapidité des évolutions technologiques, la formation est l’une des clés de la réussite de la transition.

L’augmentation des fonds de formation à destination des salariés par le FSE + est une bonne initiative. La FNA encourage la Commission à contrôler si ces moyens financiers ne sont pas accaparés uniquement par certains réseaux au détriment des entreprises des TPE de la branche.

5. Améliorer notre accès au marché, assurer des conditions de concurrence équitables et garantir notre sécurité économique

Le dernier pilier et pas des moindres, concerne les efforts prix pour maintenir une concurrence saine et loyale entre les acteurs. Le plan souhaite renforcer les dispositifs de défense commerciale vis-à-vis des autres continents.

Le volet concurrentiel en Europe est également à préserver. Rien n’est dit sur le rôle jouer par les TPE indépendantes de notre filière notamment pour offrir aux consommateurs des offres compétitives à des prix abordables. De même, le plan ne contient aucune proposition concernant l’entretien du parc roulant européen. Compte tenu du lent renouvellement de ce dernier, la réussite collective vers une mobilité plus propre et circulaire, aurait mériter un pilier dédié aux services de l’automobile.

En conclusion: 

La FNA continue de plaider en faveur d’une politique réussissant à concilier le maintien d’une concurrence loyale et équitable entre les milliers d’entreprises de l’industrie automobile avec les objectifs affirmés de renforcer notre capacité de production en Europe. Si nous parvenons à cet équilibre, nous reconsoliderons notre la filière automobile.