Accessibilité des lieux publics aux personnes handicapées: mise en conformité des établissements

Une loi de 2005 donnait aux professionnels un délai de 10 ans – soit jusqu’au 1er janvier 2015 – pour adapter leurs entreprises à l’accueil des personnes handicapées. L’échéance n’ayant pu être tenue, une ordonnance de 2014 a reporté de 12 mois les obligations des propriétaires ou exploitants (soit jusqu’au 27 septembre 2015).

Malgré ce report, de nombreux établissements n’étaient toujours pas aux normes le 27 septembre 2015. Un régime de contrôles et de sanctions a donc été mis en place par un décret du 11 mai 2016 afin d’accélérer la mise en conformité des entreprises.

Nous vous présentons ci-dessous : l’obligation de mise en conformité, les dérogations possibles ainsi que les contrôles et sanctions applicables. 

L’OBLIGATION DE MISE EN CONFORMITE

  • Les établissements concernés 

En tant qu’Etablissements Recevant du Public (ERP), classés catégorie V, les professionnels de l’automobile (garages, stations-service…) sont concernés par l’obligation de rendre accessible leur établissement aux clients handicapés.

Seules les parties des locaux accueillant du public doivent être accessibles aux personnes handicapées (ex : la boutique de la station-service, le hall d’accueil, le show-room ou les services rapides).

L’atelier de réparation, en revanche, n’est pas soumis à la règlementation ERP s’il est interdit au public et qu’il n’est accessible qu’avec l’accompagnement du professionnel (attention à l’affichage).

  • Les obligations du professionnel 

Le professionnel doit rendre accessible les parties extérieures (ex : aires de circulation, parking) et intérieures (ex : ascenseurs, locaux et équipements) de son établissement. Il doit pouvoir fournir aux personnes handicapées l’ensemble des prestations qui sont habituellement proposées à la clientèle (ex : paiement par carte bancaire, informations, machine à café, boutique…). 

Deux situations sont envisageables :

  • Soit votre entreprise est déjà accessible : vous devez alors transmettre à la Préfecture une attestation d’accessibilité, laquelle atteste de la conformité de votre établissement aux normes d’accessibilité (y compris après dérogation).  Pour les ERP de catégorie V, cette attestation peut consister en une simple déclaration sur l’honneur. Des modèles types d’attestation d’accessibilité sont disponibles sur le site du Ministère de l’Environnement (dans la partie « tout sur l’Ad’AP). 
  • Soit votre entreprise n’est pas encore accessible : vous devez alors élaborer et transmettre à la Mairie un agenda d’accessibilité (Ad’AP), formulaire Cerfa 13824*03. Par la rédaction de ce document, vous vous engagez sur les travaux à réaliser et le calendrier de leur réalisation. En contrepartie, les sanctions dont vous avez pu faire l’objet pour non-respect des règles d’accessibilité sont suspendues. Attention : depuis le 31 mars 2019, il n’est plus possible de déposer d’Ad’AP. Pour les ERP qui ne sont toujours pas conformes et sans Ad’AP, il est nécessaire de déposer une demande de mise en conformité à travers le dépôt d’une autorisation de travaux.

Le délai maximal de réalisation des travaux est de 3 ans pour les ERP de catégorie V.

En pratique, comment réaliser son état des lieux ?

Etape 1 : Je m’informe sur les normes que je dois respecter. 

Les guides suivants détaillent les points à vérifier à l’extérieur et à l’intérieur de l’établissement : 

Etape 2 : Je fais mon état des lieux. 

Le site http://www2.developpement-durable.gouv.fr/diagnostic-accessibilite/erp/ me permet de réaliser mon auto-diagnostic (descendre à la rubrique « réalisez votre auto-diagnostic » puis choisir « commerce »).   

Etape 3 : Je liste les travaux à effectuer et je les fais chiffrer. Si ceux-ci sont réalisables, j’établis un calendrier sur 3 ans et j’élabore mon Ad’AP. S’ils ne sont pas réalisables, je demande une dérogation. 

Etape 4 : Si mon établissement est conforme ou que j’ai obtenu une dérogation, j’envoie ma déclaration sur l’honneur d’accessibilité à la Préfecture. 

Pour tout renseignement technique, vous pouvez contacter le correspondant accessibilité de votre Direction Départementale des Territoires et de la Mer (DDT ou DDTM). 

Si vous désirez une visite sur place, contactez la Chambre des Métiers ou la Chambre de Commerce qui disposent de personnels formés capables de réaliser des pré-diagnostics. 

  • Le registre d’accessibilité

Une fois votre établissement aux normes, vous devez créer un registre d’accessibilité et le rendre accessible à votre clientèle au plus tard le 30 septembre 2017. Celui-ci doit pouvoir être consulté par les personnes qui le souhaitent, sur place, au principal point d’accueil de la clientèle. 

Il peut s’agir d’un registre papier ou vous pouvez choisir de le dématérialiser ou de le mettre en ligne sur un site internet.

Le registre doit indiquer les mesures qui ont été prises pour permettre à tous, et plus particulièrement aux personnes handicapées, de bénéficier des prestations en vue desquelles l’établissement a été construit. Plus précisément, le registre devra contenir :

  • Une information complète sur les prestations fournies dans l’établissement ;
  • La liste des pièces administratives et techniques relatives à l’accessibilité de l’établissement aux personnes handicapées ;
  • La description des actions de formation des personnels chargés de l’accueil des personnes handicapées et leurs justificatifs (la formation du personnel n’est obligatoire que pour les ERP dont la capacité d’accueil est supérieure à 200 personnes). 

Un arrêté d’avril 2017 a complété ce texte en détaillant précisément la liste des pièces administratives ou techniques (ou une copie de celles-ci) qui doivent figurer dans le registre :

  • Lorsque l’établissement a été construit récemment, le document attestation de la prise en compte des règles d’accessibilité délivré à l’issue des travaux ;
  • Lorsque l’établissement est conforme au 31 décembre 2014, l’attestation d’accessibilité ;
  • Lorsque l’établissement fait l’objet d’un agenda d’accessibilité programmée, le calendrier de la mise en accessibilité de l’établissement ;
  • Lorsque l’établissement fait l’objet d’un agenda d’accessibilité programmée comportant plus d’une période, le bilan des travaux et autres actions de mise en accessibilité réalisés à la moitié de la durée de l’agenda ;
  • A l’achèvement des travaux prévus dans l’agenda d’accessibilité, l’attestation d’achèvement ;
  • Le cas échéant, les arrêtés préfectoraux accordant une dérogation à l’entreprise ;
  • Lorsque l’établissement a fait l’objet d’une autorisation de construire, d’aménager ou de modifier un ERP, la notice d’accessibilité prévue dans le dossier de demande d’autorisation ;
  • Le document d’aide à l’accueil des personnes handicapées à destination du personnel en contact avec le public ;
  • Les modalités de maintenance des équipements d’accessibilité (ex. : rampas amovibles automatiques…).

Nous vous conseillons de consulter ce Guide d’aide à la constitution du Registre Public d’accessibilité pour les établissements recevant du public.

LES DEROGATIONS

Les établissements déjà existants pourront déroger à l’obligation de réaliser les travaux d’accessibilité dans l’un des cas suivants :

  • Impossibilité technique : c’est-à-dire lorsqu’il est techniquement impossible de procéder à la mise en accessibilité, par exemple si les travaux impactent la solidité du bâtiment (mur porteur). 
  • Contraintes liées à la conservation du patrimoine (bâtiments classés ou situés aux abords et/ou dans le champ de visibilité de ceux-ci).
  • Disproportion manifeste entre les travaux de mise en accessibilité et leur coût ou leurs effets sur l’activité de l’établissement (par exemple : réduction significative de l’espace ; « rupture de la chaîne de déplacement », c’est-à-dire si l’accès au bâtiment est impossible pour un type de handicap).
  • Lorsque l’entreprise est implantée dans un bâtiment à usage principal d’habitation et que les copropriétaires s’opposent à la réalisation des travaux de mise en accessibilité. 

La demande de dérogation est à envoyer au préfet en 3 exemplaires. Le préfet sollicite alors l’avis de la la sous-commission départementale d’accessibilité (SCDA) ou de la commission d’arrondissement d’accessibilité. Si la commission n’a pas répondu dans les 2 mois après que le préfet lui ai transmis la demande, l’avis est réputé favorable. 

En revanche, si le préfet ne vous répond pas dans les 3 mois de réception de votre demande, la dérogation que vous avez demandée est réputée refusée. 

LES CONTRÔLES ET SANCTIONS APPLICABLES

Le décret du 11 mai 2016 précise la procédure de contrôles et sanctions applicable aux agendas Ad’AP.  

  • Premier courrier recommandé

Depuis la parution du décret, le préfet peut demander au propriétaire ou à l’exploitant de l’établissement, par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR), de lui fournir les documents justifiant qu’il s’est engagé dans une démarche d’accessibilité. Il s’agira, le cas échéant, de l’attestation d’accessibilité, des demandes de prorogations des délais, de la preuve du dépôt et de la mise en œuvre de l’agenda Ad’AP, des éléments de suivi de l’agenda ou de l’attestation d’achèvement des travaux. 

L’entreprise dispose alors d’un délai d’1 mois pour transmettre les justificatifs demandés accompagnés de l’agenda ou de son engagement à le déposer dans un délai de 6 mois maximum. 

Autrement dit, si vous n’avez engagé aucune démarche de mise en accessibilité à la réception de la première LRAR de l’administration, vous disposerez d’un délai de 7 mois pour déposer votre agenda Ad’AP

Attention : en revanche, ne tenez pas compte des courriers que vous pourriez recevoir de sociétés privées qui tentent de vous arnaquer.

  • Mise en demeure 

Si vous n’avez pas envoyé les justificatifs demandés, qu’ils sont incorrects ou insuffisants ou que vous n’avez pas retiré le premier courrier recommandé, le préfet vous adressera une mise en demeure (par LRAR également). 

A compter de la réception de cette seconde lettre, vous disposez d’un délai de 2 mois pour transmettre les documents demandés. Sinon vous risquez de devoir payer une amende pouvant atteindre 1 500 euros pour une personne physique et 7 500 euros pour une personne morale

Si l’attestation est incomplète ou n’est pas justifiée, les mêmes sanctions pécuniaires s’appliquent. 

  • Constat de carence en cas de non-respect de l’agenda Ad’AP

Pour ceux qui ont déposé leur agenda Ad’AP, l’administration peut mettre en œuvre une procédure de constat de carence dans les cas suivants:

  • absence de tout commencement d’exécution de l’agenda Ad’AP ;
  • retard important dans l’exécution des travaux ;
  • ou si au terme de l’échéancier les engagements prévus dans l’agenda n’ont pas été tenus. 

Le préfet doit alors notifier au propriétaire ou à l’exploitant de l’installation, par LRAR, les faits qui motivent cette procédure, les sanctions encourues ainsi que la possibilité pour lui de présenter ses observations, assorties de tous éléments utiles, dans un délai de 3 mois. 

L’amende encourue dans ce cas est lourde : de 5 à 20 % du montant des travaux restant à réaliser (avec divers plafonnements prévus). 

  • Poursuites correctionnelles 

Le propriétaire ou l’exploitant qui n’a encore engagé aucune démarche de mise en accessibilité de ses locaux peut être poursuivi devant le tribunal correctionnel. Il risque alors de devoir payer une amende qui peut atteindre 45 000 euros pour une personne physique et 225 000 euros pour une personne morale. En cas de récidive, il encourt une peine de 6 mois d’emprisonnement.