La loi d’adaptation au droit de l’union européenne (DDADUE) adoptée par le Parlement le 28 février 2023 et publiée au JO du 10 mars 2023 Loi no 2023-171 du 9 mars 2023, transpose ou permet de rendre conforme le droit français avec plusieurs textes européens. Elle contient diverses mesures, dont certaines dans le domaine des ressources humaines visant à renforcer le droit des salariés en matière d’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle qui sont issues de la directive européenne du 20 juin 2019.
Pour les dispositions intéressant les entreprises, vous pouvez consulter la note FNA loi DADUE : dispositions intéressant les entreprises
Focus sur les mesures spécifiques adaptant le code du travail au droit de l’union européenne.
Le Décret n° 2023-1004 du 30 octobre 2023 portant transposition de la directive (UE) 2019/1152 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l’Union européenne, vient préciser les contours des nouvelles obligations d’informations qui pour la plupart, sont entrées en vigueur au 1er novembre 2023.
Les informations à délivrer lors de l’embauche
La loi DDADUE renforce l’obligation d’information de l’employeur avec le nouvel article L 1221-5-1 du code du travail, en instaurant une obligation pour celui-ci de remettre au salarié un ou plusieurs documents écrits contenant les informations principales relatives à la relation de travail.
Jusqu’à présent les informations transmises via la DPAE, le contrat de travail et le bulletin de salaire suffisaient pour le droit européen. Mais la directive de 2019 impose de recourir à un document spécifique pour transmettre ces informations.
Ci-après la liste des éléments d’information à fournir par l’employeur au salarié et au stagiaire, issue la directive (UE) du 29 juin 2019 (article 4), en caractères gras vous trouverez les informations imposées par le droit européen non prévues par le droit français :
- Identité des parties ;
- Lieu(x) de travail, intitulé du poste, fonctions, catégorie socioprofessionnelle ou catégorie d’emploi ;
- Date d’embauche, date de fin ou durée prévue pour un CDD ;
- Pour les intérimaires identité de l’entreprise utilisatrice ;
- Durée et conditions de la période d’essai : peut prendre la forme d’un renvoi aux dispositions législatives et réglementaires ou aux stipulations conventionnelles ;
- Droit à la formation octroyé par l’employeur le cas échéant : peut prendre la forme d’un renvoi aux dispositions législatives et réglementaires ou aux stipulations conventionnelles ;
- Durée du congé payé auquel le salarié a droit : peut prendre la forme d’un renvoi aux dispositions législatives et réglementaires ou aux stipulations conventionnelles ;
- Procédure complète en cas de rupture de la relation de travail (préavis…) : peut prendre la forme d’un renvoi aux dispositions législatives et réglementaires ou aux stipulations conventionnelles ;
- Le détail des modalités de versement de la rémunération (montant de base, éléments constitutifs, périodicité et mode de versement, heures supplémentaires) : peut prendre la forme d’un renvoi aux dispositions législatives et réglementaires ou aux stipulations conventionnelles ;
- Si durée du travail prévisible : quotidienne, hebdomadaire, mensuelle, modalités d’aménagement sur une autre période, conditions dans lesquelles le salarié peut être conduit à effectuer des heures supplémentaires/complémentaires et leur rémunération, modalités changement d’équipe : peut prendre la forme d’un renvoi aux dispositions législatives et réglementaires ou aux stipulations conventionnelles ;
- Si durée du travail imprévisible : information sur le principe de l’horaire variable, nombre d’heures rémunérées garanties et de la rémunération du travail au-delà de ces heures, heures et jours de référence durant lesquelles le salarié peut être appelé à travailler, délai de prévenance et délai d’annulation ;
- Convention collective applicable et accords collectifs : depuis le 1er novembre 2023, vous n’êtes plus tenu de remettre au salarié une notice d’information relative aux textes conventionnelles ;
- Identité des organismes de sécurité sociale percevant les cotisations et organismes de protection sociale : régimes obligatoires auxquels le salarié est affilié, mention des contrats de protection sociale complémentaire dont les salariés bénéficient collectivement en fonction d’un accord ou d’une décision unilatérale employeur : peut prendre la forme d’un renvoi aux dispositions législatives et réglementaires ou aux stipulations conventionnelles.
On retrouve ces informations (15), dans le contrat de travail, la déclaration préalable à l’embauche et dans le bulletin de salaire.
Quel délai pour la transmission des informations ?
Le délai maximal accordé à l’employeur pour la transmission individuelle des informations varie entre 7 jours et 1 mois selon la nature de l’information (vs : 2 mois) – Directive article 5
Dans les plus brefs délais et au plus tard dans un délai de 7 jours calendaires à compter du 1er jour de travail pour les informations essentielles soit :
- Identité des parties ;
- Lieu(x) de travail, intitulé du poste, fonctions, catégorie socioprofessionnelle ou catégorie d’emploi ;
- Date de début du contrat, date de fin ou durée prévue pour un CDD ;
- Durée et conditions de la période d’essai ;
- Rémunération (montant de base, éléments constitutifs, périodicité et mode de versement) ;
- Si durée du travail prévisible (quotidienne, hebdomadaire, modalités heures supplémentaires et leur rémunération, modalités changement d’équipe) ;
- Si durée du travail imprévisible (information sur le principe de l’horaire variable, nombre d’heures rémunérées garanties et de la rémunération du travail au-delà de ces heures, heures et jours de référence durant lesquelles le salarié peut être appelé à travailler, délai de prévenance et délai d’annulation ;
Pour les informations non essentielles, délai d’un mois à compter du 1er jour travaillé.
Sur quel support faut il transmettre ces informations ?
Il s’agit d’une information écrite individuelle, sur papier ou sous forme électronique.
Le Décret n° 2023-1004 du 30 octobre 2023 fixe les modalités d’application des ces dispositions et plus particulièrement la liste des informations à transmettre au salarié qui est renforcée ainsi qu’une procédure spécifique permettant au salarié d’exiger ces informations.
Nous étions dans l’attente de l’arrêté proposant des modèles de documents d’information utilisable par l’employeur.
C’est chose faite, au regard de l’arrêté du 3 juin 2024 qui regroupe les Modèles de documents d’information que l’employeur peut utiliser en personnalisant chacun d’eux selon la situation du salarié (voir dans documents complémentaires les modèles), mais également les modifier afin de tenir compte des changements possibles.
La communication de ces informations peut être faite sous format papier, ou par tout moyen conférant date certaine. Ils peuvent donc être adressés sous format électronique sous réserve que la salarié puisse y accéder, que les informations puissent être enregistrées et imprimée, que l’employeur conserve un justificatif de la transmission ou de la réception des informations. Si vous devez apporter des modifications il faut remettre au salarié un document indiquant les modifications dans les plus brefs délais et au plus tard à la date de prise d’effet des modifications, sauf si les modifications sont en lien avec un changement de dispositions législatives, réglementaires ou conventionnelle.
Ces mesures s’appliquent aux contrats conclus depuis le 1er novembre 2023.
Cette obligation concerne les nouvelles embauches, mais les salariés déjà en poste peuvent également les demander.
Pour les salariés recrutés avant le 1er novembre 2023 : pour les informations communes à l’ensemble des salariés, si non communiquées, le salarié peut en demander communication à tout moment. Il faut répondre à cette demande dans les 7 jours ou dans le mois selon la nature de l’information réclamée.
Tous les employeurs sont concernés par la remise des informations aux salariés, sauf ceux utilisant un CESU pour les salariés en CDD à temps partiel (3 heures par semaine sur une période de référence de 4 semaines) et ceux utilisant le GUSO pour les intermittents du spectacle.
Notez que les salariés qui n’auront pas reçu ces informations pourront saisir le juge prud’homal après une mise en demeure auprès de leur employeur.
Le contrat à durée déterminée et le contrat de travail temporaire
La loi instaure une meilleure information des postes à pourvoir en CDI dans l’entreprise à compter du 1er novembre 2023. Désormais, à la demande du salarié en CDD qui justifie d’une ancienneté continue d’au moins 6 mois dans l’entreprise, l’employeur doit l’informer des postes en CDI à pourvoir au sein de l’entreprise. Il en est de même pour les salariés intérimaires.
Le salarié doit formuler sa demande par tout moyen conférant date certaine à sa réception.
L’employeur doit fournir par écrit, la liste des postes en CDI à pourvoir qui correspondent à la qualification professionnelle du salarié dans un délai d’un mois à compter de la réception de la demande. Si le salarié a déjà formulé deux demandes dans l’année civile, vous n’êtes pas tenu par ces exigences.
Pour les entreprises de moins de 250 salariés une réponse orale peut être apportée à compter de la deuxième demande du salarié (déconseillé) si la réponse est équivalente à la première demande.
Vous avez les mêmes obligations pour les salariés en intérim.
Fin des périodes d’essai conventionnelles plus longues
La loi DDADUE met fin à la dérogation issue de la loi du 25 juin 2008 qui permettait aux accords de branche étendus antérieurs au 26 juin 2008 de conserver des durées maximales de période d’essai supérieures aux durées légales, le principe étant une durée maximum de 6 mois, sauf pour les cadres, la loi maintient la possibilité d’une période d’essai de 8 mois maximum.
Cette mesure est effective depuis le 9 septembre 2023, afin de laisser aux branches le soin de se mettre en conformité.
La convention collective des services de l’automobile respecte quant à elle les durées légales prévues par la loi en référence à l’article 2.03 qui prévoit une durée maximum de 2 mois pour les ouvriers et employés et l’article 4.03 qui prévoit une durée maximum de 3 mois pour les agents de maîtrise et de 4 mois pour les cadres. Pas de nécessité à se mettre en conformité avec la loi.
Le congé de paternité
La loi assimile la durée du congé de paternité et d’accueil de l’enfant à une période de travail effectif pour la détermination des droits que le salarié tient de son ancienneté – nouvel article L 1225-35-2 du Code du travail, et à une période de présence pour la répartition de la réserve spéciale de participation – Article L 3324-6 du Code du travail.
Les deux articles sont effectifs depuis le 11 mars 2023.
Le congé de présence parentale
Pour rappel, ce congé permet au salarié de s’occuper d’un enfant à charge dont l’état de santé nécessite une présence soutenue et des soins.
La loi introduit le maintien des avantages acquis par le salarié – Article L 1225-65 du Code du travail. Par conséquent, le salarié en congé de présence parentale garde le bénéfice de tous les avantages qu’il a acquis avant le début du congé.
Il en est de même dans le cas du congé parental d’éducation et du congé paternité. Cette nouvelle disposition permettra aux salariés de conserver leur droit à congés payés acquis avant leur congé.
Le congé parental d’éducation
Pour rappel, il permet au salarié de bénéficier d’un congé ou d’une réduction de son temps de travail pour s’occuper de son enfant de moins de 3 ans, sous condition d’ancienneté d’un an dans l’entreprise à la date de naissance de l’enfant ou de son arrivée au foyer.
Depuis le 11 mars 2023, le congé parental d’éducation concerne tout salarié ayant au moins un an d’ancienneté dans l’entreprise (et non plus à la date de naissance de l’enfant).
Par ailleurs, concernant les règles de prise en compte de l’ancienneté en cas de congé parental d’éducation, la loi précise que le congé parental d’éducation à temps doit être pris en compte pour moitié dans la détermination des droits que le salarié tient de son ancienneté, alors que pour un congé parental à temps partiel, c’est la totalité du congé qui doit être assimilé à une période de travail effectif pour la détermination des droits que le salarié tient de son ancienneté.