Un de vos salariés est en arrêt maladie, vous envisagez de le contrôler mais vous ne savez pas comment procéder.
Il faut savoir qu’il existe différents types de contre visite médicale : la contre visite médicale patronale et celle effectuée par la CPAM.
La contre visite médicale patronale
Faute de décret, les règles relatives à la contre visite médicale employeur étaient précisées par la jurisprudence.
Ce vide juridique vient d’être comblé par le décret 2024-692 du 5 juillet 2024, paru au JO du 6 juillet Décret du 5 juillet : contre visite médicale patronale.
Pour rappel, un salarié en arrêt maladie ou accident ayant au moins 1 an d’ancienneté dans l’entreprise, bénéficie sous conditions, du versement des IJSS et du complément salarial employeur : articles L 1226-1 et D 1226-1 du Code du travail – article 2.10 – Indisponibilité du salarié non cadre et maîtrise – article 4.08 pour les cadres, de la CCNSA.
Par conséquent, si votre salarié est dans cette situation, il vous sera possible de demander une contre visite médicale. L’objet du contrôle porte sur la réalité de la maladie et sur la présence du salarié à son domicile. Vos doutes peuvent porter sur le fait que :
- Vous avez été informé que le salarié exerce une activité professionnelle pour une autre entreprise pendant son arrêt de travail ;
- Vous avez été informé que le salarié réalise des travaux de nature physique chez lui alors que son état de santé n’est pas censé le lui permettre.
A ne pas confondre avec les contrôles diligentés par la caisse de sécurité sociale.
Notez que les frais afférents à cette visite sont à votre charge.
Attention : dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, le code local ne prévoit pas la possibilité pour l’employeur de procéder à une contre-visite médicale, comme l’y autorise le dispositif légal de droit commun. Un employeur d’Alsace Moselle ne peut pas effectuer de contre-visite médicale et suspendre le versement des indemnités complémentaires de maladie qui sont à sa charge, ceci même si le salarié était absent lors de la contre-visite.
Modalités de la contre visite
Vous avez le choix du médecin contrôleur (Cass. soc., 20 oct. 2015, no 13-26.890) et le salarié ne peut substituer aucune autre mesure de son choix, telle une visite par un médecin expert ou son médecin traitant. En général, il s’agit d’un médecin contrôleur indépendant, qui ne peut être ni le médecin du travail, ni le médecin conseil de la sécurité sociale. Vous pouvez aussi mandater un prestataire privé qui fera contrôler votre salarié par un médecin agréé et assermenté.
Le contrôle peut être fait dans le cadre d’un arrêt maladie, d’un accident du travail.
Lieu du contrôle
Il appartient au médecin de fixer le lieu du rendez-vous de contrôle. Notez que le décret précise que le rendez-vous n’a pas à se dérouler par principe au domicile du salarié. Par conséquent, c’est au choix du médecin que la contre-visite se déroule :
- Soit au domicile du salarié ou au lieu de repos communiqué par dernier
Le médecin peut s’y présenter sans délai de prévenance, à tout moment, en respectant soit les horaires de sortie autorisées par les textes (présence de 9 h à 11 h et de 14 h à 16 h), soit les horaires communiqués à l’employeur par le salarié en cas de sortie libre autorisée.
- Soit au cabinet du médecin, sur convocation de celui-ci effectuée par tout moyen. Aucun délai de prévenance n’est prévu par le décret, mais il précise que si le salarié est dans l’impossibilité de se déplacer, notamment en raison de son état de santé, il doit en informer le médecin en précisant les raisons.
N’oubliez pas d’indiquer au médecin contrôleur si le salarié bénéficie de sortie libre ou de sortie autorisée.
L’obligation d’information du salarié vis à vis de l’employeur
- Si le lieu de repos du salarié n’est pas son domicile, il doit vous donner l’adresse où il peut être contrôlé et cela dès le début de l’arrêt de travail – Article R 1226-10 du Code du travail ; même chose pour tout changement ;
- Si il est noté la mention sortie libre sur l’arrêt, il doit vous indiquer les horaires auxquels la visite pourra être faite.
Le texte est muet sur la procédure d’information par le salarié ?
On peut considérer qu’il devra être en mesure de démontrer qu’il a bien communiqué ces informations à son employeur (email, courrier RAR, voire SMS).
Que risque le salarié en cas de défaut d’information ?
Le texte est muet sur le sujet, on peut en déduire que si le lieu de repos n’est pas précisé par le salarié, l’organisation de la visite médicale au domicile du salarié devrait lui être opposable même s’il n’y est pas.
De même, si le salarié n’informe pas l’employeur des horaires de visite, on peut en déduire que l’organisation de la visite médicale à tout horaire est alors opposable au salarié, au regard de son obligation de communiquer ces horaires. Ce qui paraît le plus sur et qui serait opposable au salarié, serait la visite médicale organisée aux horaires de présence prescrits par les textes en l’absence de sortie libre.
L’obligation d’information du médecin contrôleur
Le médecin se prononce sur : le caractère justifié de l’arrêt, la durée de celui-ci et le respect par salarié des prescriptions relatives aux heures de sortie.
Une fois la visite effectuée, il vous informe :
- Du caractère justifié ou injustifié de l’arrêt de travail ;
- De l’impossibilité de procéder au contrôle pour un motif imputable au salarié (comme son refus de se présenter à la convocation ou son absence lors de la visite à domicile).
Sachez que le salarié a la possibilité de justifier de son absence par un certificat médical attestant qu’au moment de la visite il était en consultation … ,et qu’il peut refuser le contrôle pour motif légitime.
Il vous appartient de transmettre sans délai l’information au salarié – Article R 1226-12 al 1 du Code du travail.
Il adresse également son rapport au médecin conseil de la CPAM dans un délai de 48 heures. Après lecture du rapport, le médecin conseil de l’assurance-maladie peut demander à la caisse :
- De suspendre les indemnités journalières. Le salarié a 10 jours francs à compter de la réception de l’information de suspension des indemnités, pour demander à la caisse de sécurité sociale dont il relève, un examen de sa situation par le médecin conseil qui se prononcer dans un délai de 4 jours francs à compter de la saisine du salarié ;
- Procéder à un nouvel examen de la situation de l’assuré, qui est de droit si le rapport a fait état de l’impossibilité de procéder à l’examen de l’assuré.
S’il conclut à l’absence de justification de l’arrêt de travail, il en informe immédiatement l’intéressé et lui communique oralement une date de reprise du travail. Il informe également les services administratifs de la caisse et le médecin traitant.
Si le médecin contrôleur estime que l’arrêt de travail est justifié, l’employeur doit continuer à verser les indemnités journalières complémentaires.
Conséquences de l’arrêt injustifié pour le salarié
Le salarié perd le bénéfice des indemnités complémentaires s’il était absent de son domicile, n’a pu se soumettre à la contre-visite et n’a pas été en mesure à la demande de son employeur, de justifier des motifs de son absence. Cass. soc., 28 avr. 1981, n° 79-41.806
Notez que l’impossibilité de faire procéder à une contre-visite ne peut priver le salarié du complément de salaire pour la période antérieure à la date de la visite.
Attention : la contre-visite ne vous permet que de suspendre le complément de salaire. Il vous est impossible de sanctionner ou de licencier un salarié qui fait obstacle à la visite, ou est absent lors de celle-ci (Cass. soc., 27 juin 2000, n°98-40.952).
Le salarié doit se soumettre à la décision du médecin qui a effectué la contre-visite, par conséquent, il doit reprendre le travail à la date fixée par le médecin contrôleur, sous peine de perdre le bénéfice des indemnités complémentaires.
Il peut contester les résultats de la contre-visite, et doit solliciter une autre contre-visite ou demander une expertise judiciaire. Cass. soc, 26 oct. 1982, n° 80-40.875.
La contre visite médicale de la CPAM
La contre visite médicale employeur peut s’avérer utile en cas de doute, mais elle a un coût, pourquoi ne pas tenter de faire une telle demande auprès de la CPAM du lieu de résidence du salarié.
- Rendez vous sur le site Demande de contrôle médical CPAM